La détention administrative devrait-elle être appliquée aux mineurs ?

2017-05-12 05:30
中国与非洲(法文版) 2017年4期

La détention administrative devrait-elle être appliquée aux mineurs ?

Récemment, un projet de loi visant à abaisser l’âge minimum de la détention administrative de 16 à 14 ans était au centre des discussions en Chine. En tant que l’une des sanctions administratives les plus sévères, la détention s’applique aux infractions violant gravement le droit administratif, mais ne constituant pas d’accusation criminelle. La durée d’incarcération est généralement inférieure à 20 jours. Actuellement, la Chine n’impose de peine de détention administrative qu’aux personnes âgées de plus de 16 ans.

L’amendement publié par le ministère chinois de la Sécurité publique pour solliciter l’opinion publique début février a annulé l’article exemptant les mineurs de 14 à 16 ans de la peine administrative de détention, mais a conservé cette exemption pour les jeunes délinquants de 14 à 18 ans pour qui il s’agit du premier délit. Cela signifie que les mineurs de 14 ans pourraient être détenus s’ils ont commis un délit pour la deuxième fois ou plus.

Le projet de loi est considéré comme une réponse aux préoccupations croissantes concernant les mineurs délinquants, en particulier ceux impliqués dans l’intimidation et la violence dans le cadre scolaire. S’il a été applaudi, il rencontre néanmoins des inquiétudes.

PoUR

Shi Jing

Avocat

La délinquance juvénile est une plaie pour les services de sécurité publique depuis longtemps. Parce que les lois actuelles de l’administration de la sécurité publique interdisent de détenir les contrevenants de moins de 16 ans, les crimes impliquant des mineurs sont devenus plus fréquents. Certaines bandes criminelles profitent même des lois protégeant les mineurs pour employer des adolescents de moins de 16 ans et les inciter à commettre des crimes pour des gains illégaux. De nombreux enfants souffrant d’intimidation scolaire violente ces dernières années, l’abaissement de l’âge minimum pour la détention administrative permettrait de dissuader les intimidateurs et de protéger la majorité des mineurs.

En ce qui concerne les craintes que la privation de liberté causerait des dommages psychologiques aux mineurs, je pense qu’il existe des solutions pour atténuer ce problème. Pendant la détention, nous pourrions fournir aux contrevenants mineurs suffisamment de soins et de conseils psychologiques et les séparer des délinquants adultes. CA

CoNTRE

Ye Zhusheng

Professeur de droit

L’abaissement de l’âge minimum pour la détention administrative n’empêchera pas les délits, mais peut engendrer des conséquences catastrophiques voire aggraver les problèmes actuels. Compte tenu de la vulnérabilité mentale des mineurs, incarcérer ceux ayant enfreint le droit de la sécurité publique ne les aidera pas à corriger leur comportement, mais les privera de possibilités de remodeler leurs valeurs et leur morale.

Un sentiment de marginalisation pourrait les perdre de nouveau. Les sanctions administratives visent les contrevenants mineurs dont le comportement ne constitue pas un crime. Les mauvais comportements des mineurs sont totalement différents des crimes malveillants et ne méritent pas une punition sévère comme la détention. Au lieu de subir ces moyens coercitifs, les contrevenants mineurs pourraient devenir encore plus rebelles et agressifs. Certains pourraient même développer des sentiments vindicatifs et de fausses valeurs, finissant par tomber dans un abîme de crimes. CA

CoNTRE

Wang Ying

Procureuse de la délinquance juvénile

L’abaissement de l’âge minimum pour la détention administrative contribuera probablement à réduire le taux de délinquance juvénile pendant une courte période, mais entraînera des effets négatifs profonds àlong terme.

L’âge de 14 à 16 ans est une période cruciale pour les adolescents leur permettant de développer de la sympathie pour les autres. Le terrible traumatisme causé par l’incarcération entraînerait des dommages irrécupérables sur la fonction cérébrale aidant à développer cette sympathie pour les autres. Les mineurs vivent le temps différemment des adultes. Les adultes sont capables de faire face à l’inconfort psychologique causé par la détention parce qu’ils sont matures. Mais la privation de liberté, même pour un court laps de temps, est un cauchemar pour les mineurs et entraînera des dommages psychologiques à long terme. Ils peuvent également devenir encore plus agressifs en raison de cette peine. CA

PoUR

Chen Hua

Professeur de psychologie

Avec l’amélioration des moyens de subsistance, les adolescents deviennent matures beaucoup plus tôt, tant physiquement que psychologiquement. En même temps, ils sont perturbés par trois déséquilibres. Le premier est le déséquilibre entre le développement physique et psychologique puisque la maturité physique dépasse la maturité mentale. En conséquence, ils développent des besoins qui sont censés être réservés aux adultes, tout en ne réussissant pas à les gérer correctement. Deuxièmement, ils font face à un déséquilibre entre la raison et la sensibilité.

Ils sont facilement émotifs et sont incapables de faire face à leurs problèmes avec calme, ce qui les pousse à faire de mauvaises actions. Le troisième est un déséquilibre entre les besoins individuels et les besoins sociaux, car ils sont pour la plupart égocentriques et incapables de voir l’ensemble du tableau. Dans de telles circonstances, leur faire la morale ou tenter de les convaincre de bien se tenir de manière douce ne sera pas efficace.

Les infractions violentes commises par des mineurs comme l’intimidation à l’école sont sévèrement punies aux États-Unis. En Chine, cependant, il n’existe même pas de fondement juridique pour les punir. Par ailleurs, l’application de la peine de détention à des mineurs de plus de 14 ans les aiderait à réaliser qu’ils doivent faire face aux conséquences de leurs actes même s’ils sont jeunes. CA

PoUR

Wang ShanpingCommentateur média

Je pense que l’abaissement de l’âge de la détention administrative dissuadera efficacement les mineurs de violer la loi. Ces dernières années, la hausse des cas d’intimidation et de violence dans les écoles a soulevé de nombreuses inquiétudes. L’absence de sanctions juridiques efficaces est l’une des raisons expliquant ce problème.

Objectivement parlant, par rapport aux sanctions administratives comme l’avertissement et l’amendement, la détention est l’un des moyens de dissuasion les plus puissants. Une incarcération de 5 à 15 jours obligera le mineur à réfléchir à ses propres actes de manière approfondie, à réaliser leur gravité afin de se donner une chance de repartir de zéro. Recevoir un avertissement, aux yeux de nombre de ces jeunes, est peu différent de la critique d’un professeur, qui est la punition la plus légère contre le viol du règlement intérieur de l’école.

Selon le droit pénal chinois, les personnes âgées de moins de 14 ans n’ont aucune responsabilité pénale. Les mineurs âgés de 14 à 16 ans ne devraient être passibles que de crimes graves, comme le meurtre, par exemple. Cela soulève un problème, celui qu’aucune peine efficace ne peut être appliquée aux mineurs âgés de 14 à 16 ans tant qu’ils ne commettent pas de crimes graves. Mais lorsque c’est le cas, il est déjà trop tard. Par conséquent, la détention administrative pourrait servir de mesure transitoire pour corriger en temps opportun les mineurs et les empêcher d’emprunter le mauvais chemin. CA

CoNTRE

Zhao LiangshanAvocat

À la puberté, les juvéniles ont tendance à être rebelles et à développer des problèmes psychologiques. La raison pour laquelle ils commettent des délits pendant cette période, c’est qu’ils ne reçoivent pas assez d’amour et de supervision. Par ailleurs, les personnes de 14 à 16 ans ne sont pas suffisamment matures pour assumer la responsabilité de leurs actes. Dans ces conditions, la détention précoce des juvéniles ne les empêchera pas de commettre des actes répréhensibles, mais irait à l’encontre du principe de la protection des mineurs.

Les adolescents devraient être guidés plutôt que punis. La famille, l’école et la communauté peuvent jouer leur rôle respectif dans la prévention et la correction de la délinquance juvénile. Par exemple, l’école ou la communauté peut établir des groupes de soutien pour aider les mineurs étape par étape. En tant que gardiens, les parents devraient s’acquitter au mieux de leur rôle et donner aux enfants des conseils appropriés. CA