FLORENCE VALENDUC
La Chine a fait de l’écologie et de l’environnement l’une de ses priorités, avec une prise de conscience que le pays devait partir en guerre contre la pollution.« Nous devons établir fermement ce concept de civilisation écologique socialiste. Développer une relation harmonieuse entre l’homme et la nature et tout faire pour protéger l’environnement pour les futures générations », a déclaré le président Xi Jinping.
Mais concrètement, qu’est-ce que cela implique désormais au quotidien en Chine ? Quelles sont les actions citoyennes mises en place ? Les résultats sont-ils déjà visibles ? Où en est-on dans la prise de conscience écologique ?
Il y a quelques années à peine, les entreprises chinoises de partage de vélos ont été saluées par le gouvernement comme des alternatives écologiques aux transports publics surchargés dans la plupart des villes chinoises. Pourtant, l’engouement des utilisateurs pour le vélo en libre-service n’avait pas atteint le résultat escompté.
L’exploitation forestière de Saihanba à Chengde (Hebei), a accompli un miracle : celui de transformer un désert en oasis en 55 ans, au bout de trois générations. Vue aérienne prise le 4 octobre 2020.
Alors que les vélos partagés n’étaient pas une idée nouvelle en Chine, l’arrivée des « vélos sans station » est une innovation qui a fait l’unanimité dans les zones urbaines dès son lancement.Ofo a été l’une des premières entreprises à lancer le modèle de vélo en libreservice à Beijing. Rapidement, d’autres entreprises comme Mobike ont repris ce concept dans les métropoles chinoises et de nombreuses autres start-up de partage de vélos ont vu le jour, avec le soutien du gouvernement et l’enthousiasme des usagers. Le COVID-19 a également contribué au succès de ce moyen de transport individuel : Hellobike indique que dans toutes les villes chinoises où l’entreprise est présente,les trajets dits « longue distance »(plus de 3 km) ont doublé depuis avril dernier.
À l’heure actuelle, les e-bikes et véhicules électriques sont également très en vogue. Selon les données collectées par Hellobike, près de 300 millions de trajets par jour ont été effectués à vélo conventionnel dans le pays en 2019, mais plus du double de trajets ont été effectués en e-bike et scooter électrique au cours de la même année,soit environ 700 millions de trajets par jour. Ces moyens de transport ont conquis la capitale, principalement en raison d’une volonté non négociable,de la part des autorités, de limiter les émissions en ville. La pollution sonore a été aussi clairement réduite avec la quasi-disparition des deux-roues à moteur.
La transition s’est opérée d’autant plus rapidement que les fabricants chinois ont très rapidement réagi à cette volonté politique. Multipliant les prototypes et les nouveaux modèles,les entreprises, comme Niu Technology Beijing et Evoke Motorcycles,rivalisent d’ingéniosité pour répondre aux besoins des usagers et se tailler leur part du marché de l’électrique. Les entreprises étrangères ne sont pas en reste non plus sur ce marché prometteur. Dès 2010, Vespa a fait fureur à Shanghai et Peugeot a ouvert un point de vente à Nanjing. À cela s’ajoute le faible coût d’un scooter en Chine (300 à 600 euros), ce qui en fait un moyen de transport écologique très rentable.
Depuis septembre 2020, de lourdes amendes sont imposées à ceux qui désobéissent aux restrictions nationales sur les produits en plastique jetables,y compris les sacs en plastique à usage unique et les pailles. Au mois de janvier de cette même année, les autorités chinoises avaient publié une nouvelle politique déclarant que les sacs en plastique seraient interdits dans toutes les villes en 2022.
Avec le développement des grandes villes et du pouvoir d’achat, la consommation est en croissance continue, ce qui engendre une augmentation de la quantité de déchets. Le développement fulgurant de la vente en ligne en Chine, qui permet de se faire livrer très rapidement nourriture, vêtements et autres biens de consommation, mais qui produit aussi une grande quantité de déchets d’emballage, explique en partie le phénomène.
Le gouvernement s’attache sérieusement à généraliser le recyclage des déchets sur l’ensemble du territoire et incite les citoyens à « mener la bataille du tri des déchets ». Les actions de sensibilisation se multiplient, ainsi que la mise à disposition de conteneurs de différentes couleurs, de poubelles publiques compartimentées et de centres de tri municipaux.
Lors de la COP21, la Chine s’était engagée à réduire de 45 % son intensité carbone avant 2020. Un objectif déjà atteint fin 2018, avec - 46% par rapport au taux de 2005.
La Chine a pris des mesures considérables pour démanteler les centrales électriques au charbon, réduire les niveaux d’émission carbone et diminuer les taux d’émission de particules. Des progrès notables ont été réalisés en matière de qualité de l’air, et le nombre de jours de smog dans les grandes villes chinoises a diminué. Les jours de grand ciel bleu ne se comptent désormais plus sur les doigts de la main à Shanghai et Beijing, et l’air y est beaucoup plus respirable, même pendant les heures de pointe.
À plus grande échelle, la reforestation du pays a commencé il y a quarante ans, avec l’objectif de dresser une grande muraille verte de 4 800 km de long sur 1 500 km de large pour lutter contre l’avancée du désert de Gobi.Selon les autorités, les tempêtes de sable sont désormais beaucoup moins fréquentes.
La Chine veut également favoriser la transition des énergies fossiles aux énergies renouvelables. Elle est actuellement la première productrice d’énergie solaire au monde et compte bien poursuivre son développement dans les énergies vertes.
Le 2 août 2020, l’équipe de services bénévoles Yanbao explique le tri des déchets à des résidents de logements sociaux dans l’arrodissement Shijingshan, à Beijing.
Au niveau citoyen, de nombreuses associations de volontaires voient le jour dans tout le pays, initiant des actions en faveur de l’environnement et de la protection de la biodiversité.En septembre 2019 à Dalian, dans la province du Liaoning, les volontaires d’une association environnementale s’étaient donné pour objectif de nettoyer la plage de Bangchui. Plus de 150 personnes ont répondu à l’appel et 76 kg de déchets ont pu être ramassés,triés et classés. Cette action a été soutenue par les gouvernements aux niveaux local et national. Cet exemple inspirant se réplique de plus en plus, témoignant d’un réel éveil des consciences quant à l’état des sites naturels qu’il faut à tout prix protéger.
Dans le même esprit, le système de paiement en ligne du groupe Alibaba,Alipay, a lancé une initiative écologique en 2016. Les utilisateurs du miniprogramme d’Alipay, « Ant Forest »,reçoivent des points verts en cas de décision écologique dans leur vie quotidienne, pouvant être échangés pour planter des arbres dans les régions à reverdir d’urgence. Jusqu’à présent,120 millions d’arbres ont pu être plantés sur une surface de 933 km2.Ce projet a été récompensé par le prix Champions de la Terre 2019 de l’ONU pour avoir incité les consommateurs à réduire leur empreinte carbone, débouchant sur la plus grande initiative de plantation d’arbres menée par le secteur privé en Chine.
Les initiatives mises en place sont généralement bien acceptées par le grand public et vont au-delà de l’effet de mode. Une réelle prise de conscience peut être observée dans toutes les couches de la société, ce qui facilite la réalisation de l’objectif d’une Chine plus verte.