L’éducation de qualité, une priorité

2019-12-15 08:12HUFAN
今日中国·法文版 2019年12期

HU FAN

Au mois d’octobre, la fraîcheur s’installe sur les monts Dabie. À 6 heures du matin, Fang Rong, directrice de l’école primaire caritative Espoir du district de Luotian, attend que les élèves se rassemblent sur le terrain de sport, comme chaque jour. Certains élèves habitent dans des villages éloignés de l’école. Les plus âgés sont internes et ne rentrent à la maison que le week-end.

Créée en 1991, cette petite école est la première école primaire Espoir de la province du Hubei et la quatrième du pays. Luotian, où se trouve l’école, compte parmi les districts pauvres de Chine. Il se situe à l’intérieur des monts Dabie et est entouré de hautes montagnes et de sommets escarpés. La plupart des élèves viennent des villages alentour. Le village le plus éloigné se situe à plus de 10 km de l’école.

Fang Rong est arrivée en 2009, après avoir obtenu son diplôme à l’école normale. Au cours de sa seconde année d’enseignement son collègue, arrivé en même temps qu’elle,a été muté dans une école secondaire du bourg où les conditions de travail étaient meilleures. Mais Fang Rong a choisi de rester, et cela fait maintenant dix ans.

Depuis son arrivée dans cette école où les enseignants sont toujours en sous-effectif, Fang Rong a enseigné dix matières différentes, notamment les mathématiques, l’anglais, la musique et les arts plastiques. D’ailleurs, elle a également été responsable de classe, instructrice de l’organisation des jeunes pionniers, bibliothécaire et surveillante générale du dortoir des filles. L’année dernière, cette jeune enseignante de moins de 30 ans a été nommée au poste de directrice.

Une jeune femme persévérante

Fang Rong se présente souvent comme « Madame Espoir », d’abord parce qu’elle enseigne depuis plus de dix ans à l’école Espoir, ensuite parce qu’elle a elle-même été élève dans cette école.

Elle est née en 1990. Sa famille vivait dans un village du nom de Xierling, à proximité de l’école Espoir de Luotian.La famille de Fang Rong était pauvre. Ses grands-parents étaient en mauvaise santé, elle et ses deux frères cadets allaient à l’école et la famille vivait grâce aux revenus du père qui travaillait à Shanghai.

En 2002, l’école primaire de son village a été supprimée.Fang Rong a donc fait sa sixième année à l’école Espoir.Cette année-là, en raison de la pression économique, sa mère a quitté le village pour aller travailler ailleurs. Grâce au soutien des enseignants de l’école Espoir, Fang Rong a pu traverser cette année difficile.

Après l’école primaire, elle est entrée à l’école secondaire avant de s’inscrire à un programme de formation de jeunes enseignants ruraux. Après cette formation, la plupart des diplômés demandaient à être affectés dans des écoles primaires ou des collèges où les conditions de travail étaient bonnes. Mais Fang Rong a préféré retourner dans l’école Espoir où elle avait fait ses études. « Je connais chaque arbre et chaque brin d’herbe de cette école à laquelle je suis restée très attachée. »

Si ce sont plutôt des raisons sentimentales qui l’ont poussée à revenir, sa décision de rester a été motivée par son sens des responsabilités. Depuis dix ans, Fang Rong a vu beaucoup de ses jeunes collègues quitter la montagne pour aller travailler dans des écoles plus importantes, ce qui n’a pas manqué de l’affecter. Cependant, l’école dans laquelle elle travaille manque toujours d’enseignants et les professeurs suppléants représentent plus de la moitié du corps enseignant. Le personnel est donc très instable.

« Je suis chez moi ici. Si je partais aussi, ce serait irresponsable à l’égard de l’école, à l’égard des enfants qui aspirent au savoir et à l’égard des villageois. »

De l’espoir pour les enfants de Luotian

Fang Rong n’a pas choisi la facilité. Étant l’une des rares enseignantes de l’école, elle a toujours assuré une grande partie des cours. L’école propose 30 cours principaux par semaine et elle doit souvent en donner plus de 20. Dans les périodes les plus chargées, elle fait souvent des journées continues et doit surveiller les heures de devoir le matin, le midi et le soir.

L’école comprend deux autres centres d’enseignement situés au cœur des montagnes : le mercredi et le jeudi, elle se rend dans ces centres en mobylette pour aller enseigner l’anglais. L’un des centres se trouve dans le village de Songziguan, situé à plus de 10 km de l’école.

Cela fait dix ans qu’elle suit ce rythme soutenu mais elle ne s’en plaint pas car elle sait bien à quel point cette école est importante pour les enfants d’une dizaine de villages des environs. « Pour eux, cette école c’est l’espoir de pouvoir un jour sortir des montagnes. »

Comme la plupart des zones rurales du pays, cette région accuse un retard de développement et les revenus générés par l’agriculture sont faibles. Les personnes en âge de travailler choisissent généralement de travailler en ville et confient leurs enfants à leurs propres parents, qui eux, restent à la campagne. « Les parents de ces enfants attachent généralement peu d’importance à l’éducation. Ils considèrent que l’on peut très bien travailler sur un chantier de construction sans avoir été à l’école. »

Ce genre d’idées n’encourage pas les enfants à considérer l’école avec sérieux. À cela s’ajoute le manque d’accompagnement pédagogique dans la famille. Pour ces raisons,les élèves de la région ont un niveau scolaire globalement inférieur à la moyenne. Fang Rong explique que les élèves de sixième année ne maîtrisent pas encore les multiplications en mathématiques.

Dans son enfance, Fang Rong a connu les mêmes difficultés que ces élèves. Elle a donc parfaitement conscience de l’importance du soutien apporté par l’école et les enseignants. Elle est convaincue que non seulement, ces enfants doivent recevoir une attention particulière, mais qu’il faut aussi changer leur état d’esprit.

Elle leur répète inlassablement qu’il est très important pour eux de bien travailler à l’école et de poursuivre leurs études à l’université. Elle leur raconte sa propre expérience et les changements que l’école et les études ont apportés dans sa vie.

Grâce à ses efforts, les élèves développent un véritable engouement pour les études. À cet âge, il n’est pas rare que les enfants négligent les devoirs après les cours. Les élèves de Fang Rong, eux, lui demandent toujours : « Maîtresse Fang,quels sont les devoirs pour demain ? » Elle en est très fière.

Dans cette école de montagne isolée, Fang Rong voit les élèves partir les uns après les autres, une fois leur cursus élémentaire terminé, et elle est toujours ravie de recevoir de leurs nouvelles. Ces dix dernières années, plus de 30 élèves de l’école ont été admis dans des écoles supérieures et certains sont même entrés à Tsinghua, l’une des meilleures universités du pays.

Encore des défis à relever

Les élèves des classes élémentaires sont arrivés à l’école en autobus scolaire. Fang Rong explique que ces autobus scolaires sont gérés par des institutions spécialisées qui recueillent des informations sur les élèves et organisent des itinéraires pour les transporter entre leur domicile et l’école.

En dix ans, l’école a connu de grandes améliorations. L’ancien bâtiment de plein pied a été remplacé par un bâtiment de cinq étages et le terrain de sports en terre a été remplacé par un terrain de basket-ball et une piste couverte d’un revêtement en caoutchouc.

Fang Rong explique qu’à l’origine, les écoles Espoir ont été créées pour lutter contre la déscolarisation des enfants pauvres. Mais petit à petit, avec l’amélioration globale des conditions matérielles, l’organisation s’est fixé de nouveaux objectifs : subventionner la construction de nouvelles écoles et contribuer à réaliser l’égalité en matière d’éducation en améliorant les conditions d’enseignement et en offrant aux écoliers des campagnes des ressources éducatives de qualité.

Après l’achèvement de la construction de l’école primaire Espoir du district de Luotian, une cantine, une salle de classe de musique et une bibliothèque y ont été aménagées.

Fang Rong court avec les enfants.

À l’heure actuelle, l’école compte plus de 600 écoliers pour seulement une vingtaine d’enseignants. Il en faudrait au moins une dizaine de plus. Parmi les jeunes professeurs,un seul travaille dans l’école depuis plus de trois ans. Tous les autres sont des enseignants débutants qui sont dans leur première ou seconde année d’enseignement. « Si j’arrivais à avoir une équipe d’enseignants stable sur trois ou cinq ans,je serais très heureuse. »

Elle déploie donc de nombreux efforts pour retenir les enseignants : rendre leur vie quotidienne plus agréable, mettre en valeur leurs talents professionnels, leur donner l’opportunité de participer à des formations à l’extérieur afin de les aider à améliorer leurs compétences.

Bien que le problème semble persister pour le moment,Fang Rong ne se décourage pas. Elle est profondément attachée à cette terre qui l’a vue naître et grandir et se sent investie d’une grande responsabilité envers les enfants qui y vivent.

« Je suis moi-même mère de deux enfants et je comprends très bien ce que signifie un enfant pour une famille. » Après le petit-déjeuner, Fang Rong regarde sa fille de cinq ans se diriger vers le jardin d’enfants situé un peu plus loin. Régulièrement, elle est obligée de rester dormir à l’école. Maintenant, elle peut voir sa fille tous les jours, et cela la soulage ;quant à son fils de deux ans, c’est sa mère qui l’aide à s’en occuper.

« Pendant mon stage, mon professeur m’a dit : “une bonne mère aime son enfant, une bonne enseignante aime les enfants des autres.” »

« J’espère que tous les enfants de l’école auront un bel avenir et que nos efforts et notre persévérance porteront leurs fruits. »