Solidarité et profits sont-ils compatibles?
La disparition d’un enfant est toujours une tragédie et il est essentiel de propager l’information dans cette course contre la montre. C’est pour cela que Qingdao Kingtex International, qui vend de l’eau en bouteille en Chine, a commencé à mettre des photos d’enfants disparus sur ses étiquettes, avec leur date de naissance et un numéro d’urgence. Des milliers de bouteilles ont été vendues à Qingdao, dans la province orientale du Shandong, et la campagne va gagner Beijing et Shanghai, d’après la société, qui s’est engagée à verser 100 000 yuans (14 535 dollars) à toute personne lui apportant des informations de première importance sur un enfant disparu.
Cette campagne a été très commentée sur les réseaux sociaux. Si beaucoup l’ont applaudie, d’autres soulignent qu’une bouteille d’eau avec la photo d’un enfant disparu se vend entre 5 et 6 yuans (entre 0,7 et 0,9 dollar), soit près du triple du prix normal. Certains accusent l’entreprise de prof i ter du malheur des parents.
Le public semble avoir perdu toute conf i ance dans les activités caritatives des sociétés en raison d’un certain nombre de cas décevants par le passé. Mais cette fois, on devrait leur faire conf i ance. Une société doit par nature faire des bénéf i ces, il n’y a rien de mal à cela. N’est-ce pas une situation gagnant-gagnant si elles peuvent assumer leurs responsabilités sociales en faisant de l’argent ?
Le gouvernement s’est dépensé sans compter pour retrouver les enfants disparus et nous avons vu des résultats positifs. Mais il est agréable de voir des entreprises qui s’impliquent activement vu que les efforts du seul gouvernement sont loin d’être suff i sants. Les bouteilles d’eau apporteront une lueur d’espoir aux familles. Si la campagne se poursuit, nous espérons que davantage de sociétés s’impliqueront. Cela ne va-t-il pas accroître les chances de retrouver les enfants ?
Certains ont souligné qu’un prix entre 5 et 6 yuans la bouteille est trop élevé. Mais nous devrions savoir qu’il existe des produits similaires qui sont plus onéreux et qui ne comportent pas d’informations sur les enfants disparus. N’oubliez pas que la société offre aussi 100 000 yuans de récompense pour les gens qui permettent de retrouver un enfant.
En 2015, les cinémas chinois ont projeté deux f i lms sur le thème des enfants disparus, attirant l’attention du public sur la question. Comme l’eau en bouteille, les f i lms sont aussi des produits et les sociétés de production sont surtout intéressées par les ventes. Le public ne les a cependant pas accusées d’en prof i ter. Par conséquent, nous non plus ne devrions pas accuser cette société. CA
Nous avons déjà vu des campagnes semblables. Les gens ont été encouragés à prendre des photos d’enfants isolés dans les rues et aller au poste de police voir si certains enfants ressemblaientà ceux qui avaient été enlevés. Cette campagne n’a pas eu un impact réel sur les enlèvements, même s’il y a eu un nombre important de photos et des fausses alertes.
Si la société veut réellement propager des informations sur les enfants disparus, les bouteilles d’eau sont sûrement moins eff i caces que les programmes de télévision, les réseaux sociaux et internet. Et nous devons bien comprendre que l’exposition médiatique peut alerter les criminels et mettre en danger les enfants, rendant les efforts de la police encore plus diff i ciles. CA
Le monde n’est pas tout noir ou tout blanc, et entreprise et bienfaisance ne sont pas nécessairement antagonistes. De toute évidence, les sociétés font de la bienfaisance pour leurs ventes, et les célébrités le font pour leur image. Si nous le permettons, pourquoi devons-nous être si durs à l’égard de cette société ?
Cette société a le droit de vendre son produit comme elle l’entend du moment qu’elle n’enfreint pas la loi, et les consommateurs ont le droit de l’acheter ou non. Il est certain que la société se sert de la bienfaisance pour inciter les consommateurs à acheter ses produits, mais dans le même temps, elle prend aussi le risque que les consommateurs refusent de le faire. Dans tous les cas, les bouteilles d’eau véhiculent l’information et attirent l’attention du public sur la question.
Certains s’inquiètent du fait que les informations sur les bouteilles ne portent préjudice aux familles des enfants disparus ou ne les mettent en danger. Mais cela ne doit pas nous empêcher d’agir, car l’exposition médiatique est un moyen eff i cace de mobiliser toute la société et retrouver ces enfants. Par ailleurs, la société doit coopérer avec la police pour rassembler et évaluer les informations reçues avant de les transmettre aux familles.
Il n’est pas nécessaire de séparer entreprise et bienfaisance du moment que nous pouvons trouver des moyens adéquats pour intégrer les deux objectifs. La société et les médias doivent aussi donner leur chance aux entreprises qui montrent un intérêt dans la bienfaisance et les encourager af i n que plus d’entreprises s’y consacrent à l’avenir. CA
Apposer les photos d’enfants disparus sur l’emballage ne coûte que 0,25 yuan (0,036 dollar) par bouteille, mais la bouteille se vend entre 5 et 6 yuans. Est-ce un prix déraisonnablement élevé ? La société veut-elle que les consommateurs partagent le coût ? Si je suis d’accord pour que les entreprises fassent à la fois du prof i t et de la bienfaisance, c’est à la condition que l’activité commerciale ne nuise pas à la bienfaisance. L’entreprise est censée établir une plate-forme d’assistance, mais certainement pas tirer prof i t des parents des enfants disparus. Dans tous les cas, les entreprises ne devraient pas mêler prof i t et bienfaisance et faire penser aux gens qu’ils font un acte de bienfaisance s’ils achètent l’eau, car cela n’est clairement pas le cas. CA
Honnêtement, je n’achèterai pas cette eau en bouteille. J’ai été déçu à plusieurs reprises et je ne veux pas approuver ces pratiques de marketing immorales sous couvert de bienfaisance.
Combien de photos d’enfants disparus vont être imprimées sur les bouteilles ? Combien de bouteilles contiendront les informations ? Où seront-elles vendues, et pendant combien de temps ? Les bouteilles seront-elles retirées du marché quand un enfant sera retrouvé ? En tant que consommateur, nous n’avons pas les réponses à ces questions importantes.
De plus, si les traf i quants remarquent la campagne, ils risquent de déf i gurer l’enfant pour éviter qu’il ne soit reconnu. Avant de pouvoir secourir les enfants, il est important d’éviter de les mettre en danger.
Sauver les enfants disparus est une question sérieuse qui doit trouver sa réponse en respectant la loi. La société at-elle obtenu le consentement des parents avant de mettre les photos des enfants sur les bouteilles ? Même dans ce cas, personne ne peut être sûr que la société mettra la bienfaisance avant le prof i t.
Une organisation caritative sans obligations légales et sans la surveillance du public n’est pas crédible. Si cette campagne n’est qu’une nouvelle déception, encore plus de gens perdront conf i ance dans la bienfaisance et il sera plus diff i cile pour les personnes qui ont besoin d’aide d’en obtenir. CA
Je ne vais pas acheter une bouteille d’eau si je n’en ai pas besoin, uniquement pour montrer que je soutiens la lutte contre les enlèvements. Si les sociétés veulent faire de la bienfaisance, elles peuvent donner de l’argent. Mais en tant que consommateur, je ne les encouragerais pas à promouvoir leurs produits au nom de la bienfaisance. Je ne suis pas quelqu’un d’insensible. Je fais toujours suivre les messages et les articles sur les enfants disparus sur mon compte dans les réseaux sociaux quand je les vois. Mais je m’en tiens à la loi de l’offre et de la demande. Les affaires doivent rester les affaires. CA