Reportage d’Ouganda par GODFREY OLUKYA
De la distribution alimentaire à la gestion des affaires judiciaires,l’Ouganda se tourne vers un futur numérique
Sefoloza Nanozi, 50 ans, a connu un début de confinement difficile en 2020. Mère célibataire de quatre enfants, elle et sa famille ont été en mesure de survivre en innovant avec leur petit restaurant situé à Ntinda, à la périphérie de la capitale ougandaise Kampala.
« Lorsque le Président Yoweri Museveni a annoncé que le pays faisait l’objet d’un confinement total, je me suis demandé comment je survivrais avec mes enfants.Les habitants ne sortaient même pas pour travailler »,a-t-elle confié àCHINAFRIQUE. « Seules les livraisons de vivres étaient autorisées. »
« Ma fille Stella, étudiante en technologies de l’information et de la communication (TIC) à l’Université internationale de Kampala, a proposé une solution qui nous a permis de traverser cette période difficile », a raconté Mme Nanozi. Stella a mis à profit ses compétences numériques pour digitaliser les activités du restaurant au moyen d’une application mobile, et la famille a pu livrer à leur client le fruit de leur labeur.
La famille a commencé avec quelques clients, mais leur nombre a rapidement augmenté. Elle a donc dû embaucher des cuisiniers pour faire face à la demande.Même lorsque le restaurant a rouvert ses portes, les clients les plus éloignés ont continué d’utiliser le service de livraison.
Selon des recherches menées par le Bureau national ougandais des normes, de nombreux Ougandais, en particulier des jeunes sans emploi, se sont tournés vers les TIC pour trouver des issues à leur situation précaire. Parmi ces opportunités figurent l’éducation,le commerce, le marketing, la sécurité et les services bancaires, pour ne citer qu’elles. Un bon nombre de personnes ont créé des entreprises liées aux TIC à travers tout le pays.
Conscient de cette tendance, le ministre ougandaisdes TIC et de l’Orientation nationale, Chris Baryomunsi,encourage les personnes aspirant à se développer à considérer les TIC. Selon lui, c’est pour cette raison que le gouvernement accélère l’utilisation des dernières technologies afin de réaliser la vision numérique du pays. Il estime que le secteur des TIC est désormais celui qui connaît la croissance la plus rapide en Ouganda et contribue de manière significative à son PIB.
Parmi les secteurs où les TIC ont été largement introduites en Ouganda figurent le judiciaire, pour gérer les dossiers par voie électronique ; l’éducation, pour dispenser des cours en ligne ; la santé,pour des consultations médicales ; les services d’immigration, pour faciliter l’obtention de passeports ; ou la sécurité,pour faciliter l’identification de criminels.
En 2007, le gouvernement ougandais a approuvé la déclaration de vision nationale qui aspire à faire passer l’Ouganda d’un pays à prédominance agricole à un pays moderne et prospère en 30 ans. À cet effet, l’Autorité nationale de planification de l’Ouganda a élaboré la Vision 2040 de l’Ouganda afin de mettre en œuvre cette déclaration.
Le projet vise à renforcer les fondements de l’économie afin de tirer parti des nombreuses possibilités qui s’offrent à l’échelle nationale. Ces opportunités incluent les TIC, le pétrole, le gaz, le tourisme et les minéraux, entre autres. « La science et les TIC doivent être renforcées si nous voulons que la Vision 2040 réussisse », a exhorté le Président Museveni.
À cette fin, le Président ougandais a augmenté deplus de 50 % les salaires de tous les scientifiques et travailleurs liés aux TIC, mesure qui entrera en vigueur en juillet 2022.
Le 22 mars, le géant chinois Huawei a organisé le tout premier Congrès des TIC en Afrique. Se déroulant en Ouganda sous le thème « Éclairer l’avenir », le congrès a été conçu pour aider les gouvernements, les services de télécommunications, les organismes de réglementation et les entreprises à innover dans leurs modèles commerciaux, à améliorer la qualité et l’efficacité de leur service et à renforcer leur productivité numérique.
À l’instar du congrès que Huawei organise souvent à Barcelone (Espagne), le congrès ougandais a présenté les dernières technologies en matière de communication,de smartphones, de maisons et bureaux intelligents,de solutions cloud, et de villes connectées, pour ne citer qu’elles.
D’après M. Baryomunsi, le gouvernement apprécie les technologies émergentes exposées au congrès. « Nous cherchons à exploiter les nouvelles technologies telles que celles présentées par Huawei. Nous devons nous tourner vers l’avenir et commencer à mettre en place l’infrastructure numérique nécessaire pour ne pas être laissés pour compte », a-t-il expliqué.
Au sortir du congrès, de nombreux Ougandais ont acquis de nouvelles expériences dans le secteur des TIC. « J’ai quitté le congrès avec plus de connaissances,ce qui m’a aidé à proposer plusieurs activités liées au numérique dans mon établissement », a partagé Paul Mbalule, directeur d’une école primaire.
La science et les TIC doivent être renforcées si nous voulons que la Vision 2040 réussisse.
YOWERI MUSEVENI Président ougandais
Selon la ministre d’État aux TIC, Joyce Ssebugwawo,l’utilisation des TIC améliore l’ensemble des secteurs.Cela règle quelques-uns des problèmes qui nuisent à leur développement.
Parmi les secteurs où les TIC ont été largement introduites figure le judiciaire. Joseph Senabulya,directeur adjoint des TIC au ministère de la Justice et des Affaires constitutionnelles, a indiqué que le recours aux TIC avait permis de gérer les dossiers par voie électronique. « Les cas peuvent maintenant faire l’objet d’un traitement électronique. On peut déposer une affaire en ligne qui peut y être traitée.Ce système réduira la corruption et l’engorgement au palais de justice », a-t-il exprimé.
Le porte-parole de la justice, Johnson Kalemire,confirme qu’à terme, les dossiers papier disparaîtront.« Les juges n’apporteront plus de dossiers dans les salles d’audience mais des ordinateurs portables à la place », a-t-il prophétisé.
D’autres secteurs utilisent les TIC : l’éducation,pour dispenser des cours en ligne ; la santé, pour des consultations médicales ; les services d’immigration,pour faciliter l’obtention de passeports ; ou la sécurité,pour faciliter l’identification de criminels.
« Grâce aux TIC, nous pouvons plus facilement étudier à l’université. Nous nous servons de nos smartphones à des fins de recherche. Ils nous aident énormément à mener à bien nos missions car la plus grande partie de ce que nous cherchons peut être aisément trouvée sur Google », a illustré Swaibu Ochanthere, un étudiant de 24 ans. CA