Seize jours chrono :quand deux jeunes remuent ciel et terre pour aider le Hubei

2020-03-05 14:07LIQING
今日中国·法文版 2020年3期

LI QING*

L’avion qui achemine le matériel décolle enfin.

Alors que Raz Gal Or attendait à l’Aéroport international de la capitale de Beijing pour prendre un vol à destination de Tel-Aviv avant la fête du Printemps,cet entrepreneur de 26 ans et son compagnon de voyage Brian O’Shea,un jeune Argentin, ont été frappés par le nombre de personnes portant des masques dans l’aérogare. Absorbés par leurs affaires en cours, ils ne savaient pas qu’une épidémie se propageait à Wuhan, dans la province du Hubei.

Plusieurs jours plus tard, ils avaient rassemblé 229 cartons de fournitures médicales en Israël en une journée pour les expédier à Huanggang, dans l’est du Hubei, le 9 février, afin de participer à la lutte contre l’épidémie.

Ce sont ces 384 heures que relate le livreChina, We got your back(en français : Chine, nous sommes derrière toi pour te protéger) publié en chinois et en anglais par New Star Press, une maison d’édition basée à Beijing sous l’égide du Groupe international de publication de Chine. Il s’agit du premier livre traitant de la lutte contre l’épidémie du nouveau coronavirus,un témoignage de l’aide désintéressée apportée au Hubei et de la coopération entre les jeunes entrepreneurs israéliens et chinois.

L’assistance d’Israël

Après leur arrivée à Tel-Aviv, les deux jeunes entrepreneurs sont restés préoccupés par la situation en Chine. L’augmentation du nombre de patients à Wuhan et la pénurie signalée de matériel médical les ont amenés à décider de faire le plein de masques chirurgicaux pour les hôpitaux chinois qui en avaient cruellement besoin.

« Mon père me dit toujours que les Chinois nous ont beaucoup aidés, nous les Juifs, dans l’histoire », a déclaré Raz Gal Or, estimant qu’il était temps de rendre la pareille.

Couvertures des versions chinoise et anglaise du livre China, We got your back publié par New Star Press, qui décrit comment des fournitures médicales ont été envoyées en Chine.

L’Hôpital central de Huanggang reçoit notre matériel.

En plaisantant, il se présente comme un « étranger en Chine 2.0 », car il est une véritable célébrité sur Internet en Chine. Premier enfant d’un entrepreneur israélien prospère dans les affaires en Chine, Raz Gal Or vit à Beijing depuis plus de 12 ans. En 2014, il est devenu le premier étudiant israélien de premier cycle à l’université de Beijing. Mais il est aussi le co-fondateur de la société YChina, également connue sous le nom de Foreigner Research Institute, une entreprise de développement commercial spécialisée sur la Chine. En mettant en ligne des vidéos qui partagent les vues de la jeune génération d’étrangers en Chine, YChina a rapidement attiré des millions de fans après la sortie de sa première vidéo en janvier 2017.

Le père de Raz Gal Or, Amir Gal Or, est un entrepreneur bien connu dans le milieu des affaires et président de la Chambre de commerce d’Israël en Chine. En 2017, il a reçu le Prix de l’Amitié, la plus haute distinction accordée par le gouvernement chinois aux étrangers pour leur contribution exceptionnelle au développement de la Chine.

Le 25 janvier, MM. Gal Or et O’Shea ont fait la tournée des pharmacies de Tel-Aviv pour acheter des masques chirurgicaux, mais il n’y en avait que quelques milliers en stock, ce qui était loin de leur objectif. Ils se sont tournés vers Amir Gal Or pour obtenir de l’aide. « La Chine a aidé le peuple israélien tant de fois dans l’histoire, en particulier pendant la Seconde Guerre mondiale. En Chine, c’est toujours une question d’entraide », a déclaré Amir Gal Or. « C’est donc naturel que nous fassions tout ce qui est en notre pouvoir. Cela ne se discute même pas,et doit se faire encore et toujours. »Il a invité son fils à prendre la parole lors d’une réunion de la Chambre de commerce à Tel-Aviv, à laquelle ont assisté plusieurs responsables d’établissements médicaux et la demande de dons de Raz Gal Or a reçu un écho favorable lors de cet événement. « Les masques chirurgicaux, le matériel médical… Nous ferons tout ce que nous pourrons pour vous aider », a déclaré le professeur Roni Gamzo, directeur de l’hôpital de Tel-Aviv. Tslil Klainman,de la Chambre de commerce, était enthousiaste. « Nous nous souvenons de la façon dont la Chine a aidé Israël en temps de crise. Et nous voulons vraiment être là maintenant pour la Chine. » Le Centre médical Sheba, l’un des dix meilleurs d’Israël, a donné à lui seul 30 000 masques et les a aidés à en obtenir plus en les mettant en relation avec un fournisseur.

Les deux jeunes gens ont ensuite eu des discussions avec Kodan Medicam,un fournisseur de matériel médical de Jérusalem ne desservant que les principaux hôpitaux et l’armée, pour obtenir finalement un don de 50 000 gants à usage médical.

« La Chine a aidé le peuple israélien tant de fois dans l’histoire. »

La coopération entre les jeunes

En moins de 24 heures, les deux jeunes avaient récupéré plus de 100 000 masques chirurgicaux, 50 000 gants médicaux et 7 000 combinaisons de protection. « Dans ce monde de plus en plus interconnecté et mondialisé,on ne devrait pas seulement se préoccuper de ce qui se passe autour de nous, mais aussi de ce qui se passe au loin », a remarqué Raz Gal Or.

Mais le sentiment de réussite n’aura été que de courte durée à mesure que de nouveaux défis s’accumulaient.Comment envoyer 229 cartons, le tout pesant plus d’une tonne, en Chine ?

Raz Gal Or (à dr.) et Brian O’Shea encouragent la Chine dans une vidéo qui montre le processus de collecte de fournitures médicales à Tel-Aviv, en Israël, le 25 janvier.

Le père de Raz Gal Or a trouvé un masque chirurgical dans l’entrepôt. Super !

En vertu d’une nouvelle mesure annoncée par le gouvernement chinois,les dons de l’étranger peuvent être expédiés directement aux hôpitaux destinataires. Ainsi, l’équipe a également commencé à recueillir les informations disponibles en ligne sur les hôpitaux pour évaluer celui qui avait le plus besoin de matériel. Enfin, ils en ont choisi un à Huanggang, une ville à l’est du Hubei.

L’équipe a ensuite contacté Cainiao,plate-forme mondiale de suivi des colis du groupe Alibaba, pour la logistique.Mais leur progression a de nouveau été ralentie. Quand l’Organisation mondiale de la Santé a annoncé le 30 janvier que l’épidémie était une « urgence de santé publique de portée internationale », de nombreux pays ont en effet décidé de réduire ou d’annuler leurs vols à destination de la Chine.

Cainiao a finalement trouvé une société israélienne de fret prête à effectuer la livraison gratuite. Les cartons étaient prêts, avec toute la documentation nécessaire, et ils ont finalement quitté Tel-Aviv le 1erfévrier. Passant par Moscou, la cargaison est arrivée en Chine via Guangzhou, quatre jours plus tard. L’hôpital a été livré le 9 février.

« On aurait dit que le monde entier s’était ligué contre nous, mais nous avons quand même réussi à en arriver là, a déclaré Raz Gal Or avec soulagement. Accrochez-vous les gars,nous sommes derrière vous pour vous aider. »

Un souvenir inoubliable

Ce qui aurait dû être un voyage d’agrément s’est révélé plus compliqué, et les deux amis ont fait le plein de souvenirs. Ils ont publié les vidéos sur les réseaux sociaux et les sites de partage de vidéos, qui ont remporté un immense succès sur Internet.

New Star Press était à la recherche d’histoires touchantes pendant la période de l’épidémie. Ding Ning, en charge de la planification dans cette maison d’édition, aimait les histoires de personnes travaillant ensemble pour un but commun, mettant de côté les races et les autres différences. L’initiative de Raz Gal Or était la preuve que chaque individu peut contribuer à sa manière du moment qu’il s’y engage. « Cette foi est très importante pour les personnes qui luttent contre le nouveau coronavirus, ce qui nous permettra de nous sortir de toutes les difficultés », a remarqué Mme Ding.

Quand elle a contacté YChina pour proposer de publier un livre, les deux amis ont hésité car leur initiative n’était pas un coup commercial ou une occasion de faire des ventes. Mais Mme Ding les a persuadés, disant que ce n’était pas son intention non plus.L’objectif était de donner aux lecteurs un sentiment de chaleur humaine en temps de crise et de rendre hommage à la profonde amitié entre Israéliens et Chinois.

China, We got your backreflète également le sens des responsabilités et la force de la génération des jeunes nés après 1990, qui assument leurs responsabilités pour construire un monde meilleur et qui jouera un rôle plus important à l’avenir.

New Star Press a terminé les versions en chinois et en anglais en huit jours.Une édition en hébreu en collaboration avec des maisons d’édition israéliennes est en cours. « Nous prévoyons de faire don des bénéfices générés par les ventes du livre pour aider les étudiants en médecine du Hubei, a déclaré Mme Ding. C’est notre façon de contribuer à la lutte contre l’épidémie. »