par Xia Yuanyuan
La technologie chinoise de recyclage et de valorisation des déchets de cuir aide l'Éthiopie à nettoyer ses tanneries
Quelques-uns des stagiaires du laboratoire.
Située à 80 km de la capitale éthiopienne, Addis-Abeba, la rivière Modjo est une source d'eau importante pour les nombreux habitants du pays. Paradoxalement, c'est aussi l'un des fleuves les plus pollués du pays. Les déchets industriels constituent l'un des principaux polluants du fleuve. Ils contiennent de fortes quantités de chrome émanant des entreprises de fabrication de cuir présentes dans la région.
L'alignement de cette industrie sur le développement vert a été un grand défi pour l'Éthiopie. En décembre 2013, dans le cadre de l'initiative « la Ceinture et la Route », l'Institut de recherche du cuir et de la chaussure de Chine (CLFI) de Sinolight Co. Ltd. et l'Institut du développement de l'industrie du cuir (LIDI) d'Éthiopie ont créé le laboratoire conjoint sino-éthiopien pour l'industrie du cuir, pour renforcer la coopération bilatérale en matière de technologies de production de cuir moins polluant, de recyclage et de valorisation des déchets.
Le laboratoire joue désormais un rôle de premier plan dans l'amélioration des technologies permettant d'avoir des tanneries plus propres et favorisant le traitement des déchets solides du cuir. Il s'est engagé à fournir un soutien technologique à l'industrie du cuir locale afin de réduire les émissions de polluants et de parvenir au développement durable.
L'Éthiopie abrite la plus grande population de bétails en Afrique. La croissance de l'industrie du cuir y est donc rapide. Ces dernières années, le pays a attiré un nombre croissant d'investissements étrangers dans ce secteur. Par exemple, en 2012, le fabricant chinois de chaussures Huajian Group a établi une usine dans la zone industrielle orientale, près d'Addis-Abeba.
Les statistiques du LIDI montrent que l'Éthiopie a amassé 115,4 millions de dollars des exportations de cuir et de produits en cuir en 2016, soit environ 30 % des recettes d'exportation totales du pays.
Outre cette contribution économique importante, le secteur du cuir en Éthiopie a également créé des dizaines de milliers d'emplois, allant des cordonniers jusqu'aux grandes tanneries ou aux fabricants de produits en cuir.
Cependant, avec les industries de traitement du cuir, la production de déchets est inévitable. Bien que l'Éthiopie ait le potentiel de fournir du cuir et des peaux sur le marché mondial, le manque de technologies de production propres est un obstacle au développement durable du secteur.
Les tanneries sont généralement des complexes industriels très polluants, qui génèrent de grandes quantités de déchets liquides et solides. Si ces déchets ne sont pas correctement traités, ils risquent de causer des problèmes environnementaux et d'affecter la santé humaine.
Par conséquent, le pays a un besoin urgent d'améliorer le traitement des déchets de l'industrie du cuir afin d'en atténuer la pollution. La Chine est bien placée pour y contribuer, car elle est le leader mondial du tannage propre et de la technologie de valorisation des déchets solides.
La collaboration entre la Chine et l'Éthiopie dans le traitement des déchets léger remonte à 2013, année où les deux pays célébraient le 10eanniversaire de leur coopération globale. En novembre de la même année, les ministères des deux pays chargés des sciences et technologies ont signé un mémorandum d'accord sur la création d'un laboratoire commun pour le cuir en Éthiopie. Axés sur ce document, le LIDI et le CLFI ont entamé leur partenariat en matière de gestion des déchets de tannerie en décembre 2013.
Le tannage au chrome est un élément important de l'industrie du cuir. Il permet de rendre le cuir souple et de grande qualité.Cependant, dans le processus de production, 25 % du chrome n'est pas absorbé et peut se transformer en copeaux ou finit en quantité importante dans les eaux usées ou en boue.
Entre 2013 et 2017, la Chine a fourni à l'Éthiopie des équipements et des technologies, notamment celles permettant une production propre, une gestion des déchets solides, une extraction de la protéine de collagène issue de copeaux de chrome et le traitement des eaux usées. Des experts de Chine ont été envoyés pour mener des formations dans le laboratoire.
Par exemple, le recyclage des eaux usées chromées, une technologie brevetée appartenant à la Chine, pourrait non seulement filtrer les impuretés solides contenues dans le liquide résiduel de tannage au chrome,mais également réutiliser l'agent de tannage au chrome récupéré. Dans le processus de tannage de la production de cuir, le taux de récupération de l'agent de tannage au chrome dans les déchets liquides peut atteindre 99,9 %, selon le professeur Ding Zhiwen, chef du projet et vice-président du CLFI.
Certains des équipements du laboratoire commun.
« La nouvelle technique peut économiser plus de 25 % de chrome par rapport au procédé de tannage au chrome traditionnel.Le dosage de l'agent tannant et l'utilisation d'eau sont réduits de plus de 95 %, ce qui élimine le problème de pollution par le sel de chrome lors du processus de tannage et permet de respecter les normes de rejet des eaux usées », a-t-il ajouté.
Outre la réduction de la pollution, la technologie et l'équipement chinois de recyclage des eaux usées de chaux et de chrome aident également à transformer les déchets en éléments de valeur.
« La technologie chinoise et l'équipement de traitement intégré des eaux usées permettraient d'extraire l'agent de tannage au chrome des résidus de liqueur de chrome,qui pourraient être réutilisés dans la fabrication du cuir. D'autres déchets solides,tels que les boues, pourraient également être utilisés pour l'incinération à des fins de production d'énergie », a certifié Zerfie Mersha, directeur de la technologie pour l'environnement du LIDI.
Pendant la mise en œuvre du projet, 76 Éthiopiens ont été formés à l'utilisation de nouveaux équipements et des nouvelles techniques.
L'un d'eux est Chernet Yonas Kebede. Il a commencé comme ouvrier et est maintenant technicien responsable du travail de recyclage des déchets de cuir.
« Mon salaire mensuel est passé de moins de 2 000 birrs (74 dollars) à 4 500 birrs(167 dollars) », a raconté M. Kebede. Il est reconnaissant d'avoir eu l'occasion d'apprendre les nouvelles techniques chinoises dans le domaine du cuir. « Grâce à la formation, je suis maintenant responsable de l'exploitation des installations de traitement des eaux usées en cuir. C'est très gratifiant pour un travailleur ordinaire qui souhaite exercer de manière autonome pour subvenir aux besoins d'une famille de quatre personnes et qui dispose également d'une hypothèque », a-t-il précisé.
Ato Berhanu Negus, coordinateur du secteur des produits et de la productivité du LIDI, a indiqué que le laboratoire commun avait introduit de nouvelles technologies et développé un groupe de nouveaux talents.Selon lui, le partenariat entre les deux instituts accélère encore les avantages mutuels entre la Chine et l'Éthiopie dans le secteur du cuir.
M. Mersha a annoncé que, à long terme,le LIDI envisage de construire une usine de traitement des déchets solides du cuir avec une capacité de traitement quotidienne de 30 à 50 tonnes en Éthiopie. CA