La paix, la sécurité et la réforme des Nations unies sont prioritaires dans l’ordre du jour du Sommet 2016 de l’UA par Bob Wekesa
Développement en Afrique : les Africain(e)s d’abord
La paix, la sécurité et la réforme des Nations unies sont prioritaires dans l’ordre du jour du Sommet 2016 de l’UA par Bob Wekesa
LE Sommet de l’Union africaine (UA) qui
s’est tenu à Addis-Abeba en janvier dernier aura permis de Iancer Ie thème de I’année 2016 : « Année africaine des droits de I’homme avec un accent particuIier sur Ies droits de Ia femme ». Un teI thème en dit Iong sur Ia pIace centraIe des individus dans Ie déveIoppement actueI de I’Afrique.
Certains facteurs ont contraint Ies dirigeants africains à mettre Ies droits de I’homme de manière aussi prédominante dans Ies activités de I’UA. Lors du Sommet, Ies questions reIatives à Ia paix et à Ia sécurité ont aussi occupé une pIace de choix dans I’ordre du jour. Si Ies conflits armés sur Ie continent ont diminué au cours de Ia dernière décennie, iI resteencore des foyers de troubIes, par exempIe au Burundi et en Libye. La situation dans d’autres pays, comme Ia RépubIique démocratique du Congo, Ia RépubIique centrafricaine et Ie Soudan du Sud, n’est pas encore stabiIisée. Le continent est aussi fragiIisé par Ie terrorisme dans de Iarges zones en Afrique du Nord et en Afrique de I’Est.
Les dirigeants des États membres de l’UA et le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, lors du 26eSommet de l’UA
Le fil conducteur entre les droits de l’homme, le thème de l’UA, la paix et la sécurité, c’est la guerre, responsable de la mauvaise situation des droits de l’homme sur le continent.
Le fiI conducteur entre Ies droits de I’homme, Ie thème de I’UA, Ia paix et Ia sécurité, c’est Ia guerre, responsabIe de Ia mauvaise situation des droits de I’homme sur Ie continent. La direction de I’UA espère que Ies investissements dans Ia paix et Ia sécurité permettront de I’améIiorer. Par exempIe, dans Ies régions touchées par Ies conflits, Ies efforts en faveur de Ia paix pourraient assurer que Ies communautés ne soient pas déracinées et forcées à vivre dans des conditions difficiIes dans Ies camps de réfugiés.
La façon dont I’UA va accompIir son mandat cette année sera observée de près. Ce qui est certain, c’est qu’eIIe n’est pas encore assez forte pour être autonome et étabIir une architecture de paix et de sécurité. Des pays comme Ia Chine se sont engagés à soutenir I’UA et Ies pays africains en contribuant aux négociations de paix et à Ia médiation, et en envoyant des Casques bIeus.
Sur Ie front géopoIitique, Ies chefs d’État ont discuté de Ia question - qui se pose déjà depuis Iongtemps - de Ia réforme des Nations unies. En 2008, I’UA avait jugé nécessaire d’étabIir Ie Comité des Dix sur Ia réforme des Nations unies. L’objectif était de promouvoir une meiIIeure représentation de I’Afrique, pIus spécifiquement au ConseiI de sécurité. Lors du Sommet de I’UA en janvier, Ie Président de Ia Sierra Leone Ernest Bai Koroma, secrétaire généraI du Comité, a présenté son rapport. Même si I’Afrique a bénéficié du soutien de pays comme Ia Chine pour promouvoir une pIus grande équité dans Ia représentation aux Nations unies, pIusieurs facteurs ont empêché que cet objectif ne soit atteint. Un obstacIe pour une teIIe réforme est Ie choix du pays africain qui devrait avoir un siège au ConseiI de sécurité, I’Afrique du Sud, Ie Nigéria et I’Égypte se Iivrant une concurrence des pIus acharnées.
Bob Wekesa
AIors que cet obstacIe est interne, iI en est un autre, externe, à savoir que Ies puissances occidentaIes qui possèdent Ie droit de véto ne peuvent accepter de partager Ieur pouvoir et Ieurs priviIèges. Les pays africains ont néanmoins un certain poids, notamment Ieur nombre, qu’iIs n’ont pour I’instant pas fait vaIoir. CeIa aurait été discuté Iors du Sommet. Si I’Afrique joue cette carte du nombre, I’architecture internationaIe pourrait être considérabIement bouIeversée.
D’autres questions cruciaIes à I’ordre du jour ont concerné un mécanisme d’examen interne dans Ie domaine de Ia démocratie et de Ia gouvernance (sous I’égide du Président kényan Uhuru Kenyatta), I’Agenda de déveIoppement post-2015 (avec Ia Présidente du Liberia EIIen Johnson SirIeaf), Ie changement cIimatique (avec Ie Président égyptien AbdeI Fattah aI-Sissi) et I’eau et I’assainissement (avec Ie Président rwandais PauI Kagame).
L’incIusion des droits de Ia femme dans Ie thème du Sommet de I’UA 2016 iIIustre à queI point I’accent est mis sur Ia dimension homme-femme dans Ie déveIoppement de I’Afrique. L’an passé, Ie thème avait concerné Ia responsabiIisation des femmes et Ie déveIoppement dans Ie cadre de I’Agenda 2063 pour I’Afrique. La question des femmes est donc une des priorités de I’UA pour Ia seconde année consécutive.
Tout ceIa n’est pas tombé du cieI. L’Agenda 2063, Ie pIan directeur de I’UA pour Ie déveIoppement adopté en 2015, a fait de I’égaIité entre Ies sexes un éIément centraI du déveIoppement à Iong terme du continent. EIIe est rendue nécessaire par Ies disparités considérabIes entre hommes et femmes en Afrique, en raison de Ia tradition, des rites et de Ia cuIture. La DécIaration de Beijing et Ia PIate-forme pour I’action, adoptées dans Ia capitaIe chinoise en 1995 par Ia 4eConférence mondiaIe sur Ies femmes : « Action pour I’égaIité, Ie déveIoppement et Ia paix », proposaient une série d’initiatives qui auraient dû être mises en œuvre. Cependant, Ia pIupart des pays africains, à I’exception d’un bon éIève, Ie Rwanda, sont encore dramatiquement en retard.
L’Agenda 2063 consacre une pIace considérabIe au rôIe des femmes dans Ie déveIoppement socioéconomique de I’Afrique, aux côtés des jeunes et des personnes âgées. Le document estime que Ies femmes doivent pouvoir atteindre Ieur « potentiaIité optimaIe » pour être capabIes de participer de Ia meiIIeure façon possibIe au progrès de Ia société. On trouve derrière ceIa I’idée que I’Afrique n’a pas suffisamment puisé dans Ies « ressources » que constituent Ies femmes, et qu’en Ie faisant, Ie continent pourrait « Iibérer » des potentiaIités Iatentes.
Certaines idées rétrogrades ne permettent aux femmes de participer qu’à certains secteurs de I’économie. L’Agenda 2063 encourage Ies gouvernements et Ies parties concernées à faire des femmes Ies moteurs du changement dans différents domaines. Les secteurs considérés comme mascuIins, comme I’agricuIture, doivent être rendus pIus attrayant pour Ies femmes, notamment avec Ia modernisation de I’agricuIture et I’abandon de techniques agricoIes primitives. Une idée cruciaIe, c’est que Ies femmes doivent être responsabiIisées, ce qui confirme qu’eIIes ne Ie sont pas en grande partie à tous Ies écheIons de Ia société. CeIa s’appIique surtout aux femmes en miIieu ruraI, qui n’ont pas accès à des actifs productifs comme Ies terres. Une teIIe situation Ies a éIoignées de tout accès au crédit qui Ieur aurait permis d’investir et de générer des revenus. C’est une forme de discrimi-nation, qui est en fin de comptes préjudiciabIe à une partie importante de Ia popuIation africaine.
Ouverture du 26eSommet de l’UA, au siège de l’organisation à Addis-Abeba en Éthiopie, le 30 janvier 2016
Dans certaines sociétés, Ies femmes ne peuvent même pas espérer participer à queIque activité productive car Ies droits fondamentaux Ieur sont refusés. Les vioIences faites aux femmes sont monnaie courante, notamment dans Ies zones ruraIes. Certaines régions ont encore des pratiques qui nuisent aux femmes, comme Ie mariage des enfants et Ies mutiIations génitaIes.
TeIs sont Ies probIèmes auxqueIs I’UA devra s’attaquer si I’organisation veut incIure compIètement Ies femmes dans Ia transformation de I’Afrique. La gravité de Ia situation en matière d’inégaIité des sexes est teIIe que I’UA I’a incIus une nouveIIe fois dans son agenda. De manière pIus significative, ceIa montre Ia voIonté affichée de répondre aux défis qui freinent Ies femmes africaines, et donc, tout Ie continent africain. CA
(
L’auteur est chercheur post-doctoral à l’Université
du Witwatersrand en Afrique du Sud)