Li Yanhong, créateur de Baidu

2016-11-23 07:08FranceCHRISTOPHETRONTIN
今日中国·法文版 2016年11期

(France) CHRISTOPHE TRONTIN

Li Yanhong, créateur de Baidu

(France) CHRISTOPHE TRONTIN

Li Yanhong

Chaque mois, La Chine au présent vous raconte l'histoire d'une invention chinoise, ancienne ou récente, absolument véridique ou un peu romancée, et de son auteur. Ces personnages qui ont fait la Chine et le monde tels que nous les connaissons aujourd'hui...

Tout inventeur connaît un moment de découragement ; un moment où il est le seul à croire encore en son invention... Pour Li Yanhong, connu à l’étranger comme Robin Li, ce fut lors de ce pique-nique de la Silicon Valley, en été 1998. Il était à l’époque chef de département dans une start-up américaine, Infoseek, où il travaillait à perfectionner un moteur de recherche sur Internet. Hélas, sa société venait d’être rachetée par Disney et Mickey Mouse ne croyait pas aux moteurs de recherche... Il profita de ce pique-nique entre geeks pour partager son amertume avec son collègue Wu qui travaillait, lui, sur le moteur de Yahoo... Chez Yahoo, on croyait tellement peu à l’avenir des moteurs de recherche que l’on avait carrément décidé de le sous-traiter à une petite start-up inconnue appelée Gogol, ou Gougou, ou enfin bref un nom comme ça qui n’évoquait rien pour personne.

En cet été 1998, Li Yanhong sifflait cocktail sur cocktail en se disant que sa carrière, jusque là plutôt prometteuse, était décidément arrivée à un point mort. Titubant, débraillé, il repassait en boucle les étapes de son CV qu’il scrutait comme des lignes de code, à la recherche de l’erreur d’embranchement qui l’avait mené dans cette impasse. Où s’était-il trompé ? Quand avait-il manqué le coche ?

Né dans le Shanxi, seul garçon dans une famille de 5 enfants, il avait toujours été le petit préféré de sa maman qui caressait pour lui les plus hautes ambitions. Ses parents, ouvriers, s’étaient saignés aux quatre veines pour l’envoyer étudier la gestion de l’information à l’université de Beijing. Puis il avait obtenu, sur la foi de ses bons résultats, une bourse pour aller étudier aux États-Unis. C’est là qu’il avait découvert ce nouveau monde, ces « autoroutes de l’information » comme on disait à l’époque, et qu’il a trouvé son premier job dans une entreprise appelée Information Services à programmer des algorithmes. C’est là également qu’il développa RankDex, un système de classement et d’archivage de l’information, le cœur de tout moteur de recherche, avant de changer d’entreprise pour aller, en 1997, offrir ses services à Infoseek, une start-up spécialisée, comme son nom l’indique, dans la recherche sur Internet...

En 1998, personne n’imaginait encore précisément comment Internet allait se développer. Chacun avait une vision différente du potentiel qui s’ouvrait pour les entreprises et les internautes, le seul point sur lequel tout le monde s’accordait était qu’il était immense. Allait-on vers quelque chose de gratuit, ou de payant ? L’Internet allait-il rester un domaine réservé aux spécialistes ou au contraire se généraliser à toute la population ? La circulation planétaire de l’information allait-elle fonctionner aussi sur un mode local ? Et surtout, comment allait-on organiser les milliards de pages Web qui déjà se bousculaient, et trouver, dans cette surabondance, celles qui correspondent à vos besoins ?

Telle était l’obsession de Li Yanhong qui n’en dormait plus. Jour après jour, il persécutait ses assistants et criait sur ses managers : il faut organiser l’info ! Il faut classer, ranger, ordonner les sites et les contenus ! Mettre de l’ordre dans le chaos !

Féru d’intelligence artificielle, et puisque la recherche en ligne n’était plus la priorité de ses patrons, il se mit à travailler sur un système automatisé de classement des images. C’est ainsi qu’il mit au point le système de recherche d’images en ligne qui fut revendu à un portail appelé Go.com. Encouragé par ce succès commercial, et riche désormais d’un petit pécule, il décida de prendre le tournant qui lui faisait peur et envie à la fois : devenir entrepreneur. Puisque personne ne croyait en son moteur de recherche, il allait travailler pour son compte, et prouver à tous que là, et pas ailleurs, se trouvait la clé de l’avenir d’Internet.

Et d’ailleurs cet avenir, où allait-il se construire ? Aux États-Unis, dans la Silicon Valley, où se bousculaient les start-ups, où les banquiers prenaient un air méprisant lorsqu’on leur exposait, semaine après semaine, le centième, puis le millième, projet de révolution numérique ? C’est ça peut-être qui fut son pari le plus fou ! Rentrer en Chine, un pays encore peu informatisé, où l’Internet restait un secret partagé entre spécialistes universitaires, pour y lancer son entreprise de services en ligne.

C’est en 2000 que naît Baidu, la petite start-up qui devint grande.