La gouvernance mondiale, un nouveau point clé du partenariat sino-français

2022-08-03 08:09ParTIANDEWEN
今日中国·法文版 2022年8期

Par TIAN DEWEN

Le 20 juin, les résultats du second tour des élections législatives ont été proclamés. La coalition du président Emmanuel Macron, Ensemble !, est arrivée en tête avec 245 sièges, mais loin de la majorité absolue de 289 députés dans l’hémicycle. Par rapport aux élections législatives en juin 2017, le camp du président, perdant 105 sièges, a subi une grande défaite.

Le parti de droite les Républicains (LR) n’a obtenu que 61 députés, abandonnant 60 sièges par rapport aux législatives 2017. La Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes), coalition des principaux partis de gauche, a enregistré la plus grande augmentation de députés, passant de 17 à 131. Le Rassemblement national (extrême droite) a décroché 89 sièges, un score qui est inférieur à ceux de la coalition présidentielle et des partis de gauche, mais qui constitue une percée sans précédent. Les résultats des élections législatives montrent que la force des partis centristes en France décline à un rythme accéléré, et que la « radicalisation » pourrait devenir une caractéristique importante des changements possibles dans le paysage politique du pays.

Pour la coopération sino-française, ces changements en France pourraient apporter de nouveaux défis mais aussi créer de nouvelles opportunités. Dans la situation marquée par des changements majeurs inédits depuis un siècle, tant que la Chine et la France insistent sur le principe de bénéfice mutuel, elles peuvent aller plus loin dans leur coopération pragmatique.

Plus de coopération dans la gouvernance mondiale

La coopération sino-française en matière de gouvernance mondiale pourrait devenir un nouveau point fort des relations bilatérales. Après les élections législatives, si la coalition du président français avait pu conclure un accord avec LR, une majorité absolue relativement faible aurait encore pu être conservée. Mais au lendemain du scrutin, Christian Jacob, alors président de LR, a déclaré qu’il n’avait pas l’intention de coopérer avec la coalition présidentielle, il est donc difficile de former une nouvelle coalition. De plus, même si une coalition finit par se dessiner, sa force de cohésion ne sera pas comparable à la prédominance du président de 350 sièges dans la précédente législature. Par conséquent, lors de son second mandat, Emmanuel Macron verra indéniablement son rôle d’« hyper-président » être plus contraint par l’Assemblée nationale, ce qui entravera ses réformes. Le programme d’allongement de l’âge de départ à la retraite, notamment, pourrait faire face à davantage de défis.

Alors que les réformes engagées en France deviennent plus difficiles, le président français est susceptible de se consacrer à la diplomatie avec plus d’enthousiasme. Avec le conflit russo-ukrainien, la position des puissances telles que la France et l’Allemagne s’est considérablement dégradée au sein de l’Europe. Pour maintenir la position de la France sur la scène internationale, M. Macron serait enclin à adopter une position plus active dans la gouvernance mondiale au cours de son second mandat. La Chine et la France maintiennent depuis longtemps de bonnes relations de coopération sur divers sujets mondiaux, tels que la lutte contre le changement climatique, la protection de la biodiversité et la défense du multilatéralisme. La coopération des deux parties en matière de gouvernance mondiale pourrait insuffler une nouvelle vitalité au développement des relations bilatérales.

La fête de la Musique à Wushang Mall à Wuhan (Hubei), le 17 juin 2022

Une question de consensus

Après les élections législatives, les combats entre les partis d’extrême gauche, du centre et d’extrême droite au sein du parlement devraient être plus ardents. Il sera difficile de parvenir à des consensus politiques entre des coalitions dans un avenir proche, sans compter qu’il y a aussi des contradictions entre les partis de chaque coalition. Pour la coalition des partis de gauche, il n’est pas encore certain que la France insoumise, le Parti socialiste (PS) et Europe écologie les Verts (EELV) puissent vraiment parler d’une seule voix à l’avenir. Le 20 juin, Jean-Luc Mélenchon a appelé à créer un groupe unique à l’Assemblée nationale, ce qui a été rejeté par le PS, EELV et le Parti communiste français. Toutefois, même si les divergences entre les partis français portent sur presque tous les points, ils veulent tous stimuler la croissance économique, freiner l’inflation et créer des emplois. À cet égard, la coopération avec la Chine peut certainement jouer un rôle positif.

Lu Shaye (2e dr.), ambassadeur de Chine en France, visite la chaîne de fabrication de produits laitiers des Maîtres Laitiers du Cotentin en Normandie, le 14 janvier 2022.

Des enfants jouent dans une fontaine près de la Tour Eiffel en pleine canicule. Des vagues de chaleur ont balayé plusieurs pays cet été en raison principalement du changement climatique. La Chine et la France doivent approfondir leur coopération pour lutter contre le changement climatique.

Ces dernières années, la Chine et la France ont favorisé ensemble la coopération dans divers domaines tels que l’énergie nucléaire civile, l’aéronautique et l’aérospatiale, la biomédecine, ainsi que l’agriculture. La Chine est le premier pays asiatique investisseur en France depuis de nombreuses années, et les entreprises à capitaux mixtes sino-français ont créé de nombreux emplois dans les deux pays. Pour le moment, il n’y a pas de parti extrême anti-Chine parmi les principaux partis politiques de la France. Malgré les résistances dans la promotion de la coopération sino-française, la préservation de l’intérêt général de la coopération bilatérale pourrait encore devenir le consensus des principaux partis en France.

Se préparer à relever des défis

La coopération pragmatique sinofrançaise risque d’être davantage affectée par des facteurs « non pragmatiques » en France.

Premièrement, la radicalisation des partis politiques français rend plus intenses les combats entre eux, conduisant à une situation où « tant que tu le soutiendras, je m’y opposerai ». Deuxièmement, la prise de décision politique est susceptible d’être tenue en otage par certains groupes d’intérêts. La radicalisation des partis français est basée sur le caractère fragmenté des groupes d’intérêts du pays. Les cas dans lesquels des classes, groupes et industries minoritaires ont fait échouer des projets de loi soutenus par la majorité, en vue de sauvegarder leurs propres intérêts, sont nombreux. Troisièmement, sur le plan des relations internationales, l’Assemblée nationale aura tendance à insister sur une « diplomatie des valeurs ». Quatrièmement, l’efficacité de la prise de décision de l’Assemblée nationale pourrait être encore réduite. Dans la nouvelle Assemblée nationale, le nombre des députés ayant peu d’expérience politique a augmenté, la possibilité de prendre des décisions « non professionnelles » dans le domaine diplomatique risque d’augmenter et la prévisibilité de la prise de décision sera aussi affectée. Cinquièmement, la stabilité du gouvernement français pourrait sans doute se dégrader. En raison de la perte de la majorité absolue, le candidat premier ministre soutenu par Emmanuel Macron risque d’être contesté. Jean-Luc Mélenchon a annoncé son intention de déposer une motion de censure contre la première ministre Élisabeth Borne. Ces changements sont susceptibles de provoquer un impact négatif sur la coopération pragmatique sino-française, à laquelle les deux pays doivent se préparer de manière adéquate.

Durant le premier mandat d’Emmanuel Macron, la France a adopté une attitude positive à l’égard de la coopération sino-française. À des changements majeurs inédits depuis un siècle s’ajoute la pandémie. Le partenariat sino-français gagnantgagnant est non seulement propice aux intérêts des deux pays, mais il joue également un rôle moteur pour les relations sino-européennes, promouvant la paix et le développement dans le monde. Le président chinois Xi Jinping et le président français Emmanuel Macron ont eu une conversation téléphonique le 10 mai, au cours de laquelle le second a souligné l’esprit d’ouverture avec lequel les deux pays ont développé les relations bilatérales depuis l’établissement de leurs relations diplomatiques. Selon lui, au cours des cinq dernières années, les deux parties ont mené une coopération fructueuse dans divers domaines. Dans les cinq années à venir, la France travaillera avec la Chine pour approfondir la coopération dans des domaines tels que l’agriculture, l’aviation, l’énergie nucléaire civile et la culture, ainsi que pour renforcer la coopération dans la lutte contre le changement climatique et la préservation de la biodiversité, afin d’engranger de nouvelles réussites dans les relations franco-chinoises. Il a aussi déclaré que la France était disposée à jouer un rôle positif dans le développement des relations entre l’UE et la Chine.

Le nouveau visage du village de Luotuowan

À l’issue des élections législatives, les décisions du président français pourraient être plus restreintes par des facteurs de politique intérieure, ce qui apporterait une incertitude à la coopération sino-française. Mais comme l’a souligné le président chinois, les deux parties doivent s’en tenir à l’aspiration originale de l’établissement de leurs relations diplomatiques, caractérisées par « l’indépendance, la compréhension mutuelle, la clairvoyance et les bénéfices mutuels », s’en tenir au positionnement d’un partenariat stratégique global étroit et durable, ainsi que respecter les intérêts fondamentaux et les préoccupations majeures de chacun, afin d’assurer un développement durable des relations bilatérales.