Les investissements étrangers accueillis sur le marché chinois de la retraite

2017-06-05 14:21DANGXIAoFEImembredeladaction
今日中国·法文版 2017年4期

DANG XIAoFEI, membre de la rédaction

Les investissements étrangers accueillis sur le marché chinois de la retraite

DANG XIAoFEI, membre de la rédaction

Les seniors représentent un marché qui intéresse de plus en plus d’acteurs. Avec l’ouverture du secteur aux investisseurs étrangers, le potentiel des services au troisième âge ne fera qu’augmenter au fi l des ans.

Avec le vieillissement rapide de la population, l’industrie du troisième âge intéresse toute la société en Chine. On parle de nouvelle mine d’or, après celle de l’immobilier. L’énorme potentiel du marché de la retraite attire beaucoup d’investisseurs étrangers.

Un marché très prometteur

Wu Zhigao était journaliste à la Radio nationale de Chine avant son départ en retraite. Il y a trois ans, comme sa femme souffrait de la maladie de Parkinson, il a décidé à 83 ans d’aller vivre avec elle dans une maison de retraite de Beijing. Grâce aux soins professionnels, sa femme a changé et est désormais d’humeur joyeuse. M. Wu est réconforté.

M. Wu n’avait pourtant pas prévu à l’origine de s’installer dans une maison de retraite. Avec 55 ans de vie commune derrière eux, les deux conjoints partagent un amour profond. « Comment aurais-je pu l’envoyer seule en maison de retraite alors qu’elle est malade ? » explique-t-il. Son fi ls est à Shanghai, sa fi lle à Beijing, et leur travail prenant ne leur permet pas de prodiguer les soins nécessaires. Il était aussi trop dif fi cile pour M. Wu de s’occuper seul de sa femme, et il a refusé d’employer une aide ménagère. Finalement, la maison de retraite s’est imposée comme le meilleur choix.

M. Wu voit déjà sa maison de retraite comme un foyer. Dans la chambre est suspendue leur photo de mariage, et dans le salon, des photos de famille. Il raconte avec douceur les anecdotes qui accompagnent chaque photo : le couple vu avec leur fi ls lorsque celui-ci a obtenu sa maîtrise aux États-Unis ; une photo de sa fi lle pour sa remise de diplôme universitaire ; une photo de sa petite- fi lle ; une photo de toute la famille au temple du Ciel en 1984...

M. Wu est l’une des nombreuses personnes âgées qui font face au problème de la retraite. Selon le Bulletin de statistique du développement des services sociaux 2015 publié par le ministère des Affaires civiles en 2016, à la fi n de l’année 2015, la Chine comptait 220 millions de personnes âgées de 60 ans et plus, soit 16,1 % de la population totale ; 143 millions de personnes âgées de 65 ans et plus, soit environ 10,5 % de la population totale. Dans le même temps, en raison de la baisse constante du taux de natalité et de l’augmentation de l’espérance de vie, le vieillissement de la population s’accélère, ce qui engendre une énorme demande dans le secteur des services aux personnes âgées.

Les Chinois changent d’idées en matière de retraite. Alors qu’ils comptaient auparavant sur leurs enfants pour s’occuper d’eux durant leur vieillesse, ils ont de plus en plus recours aux institutions de retraite. Selon un sondage réalisé auprès de 2 002 personnes par le Centre d’enquêtes sociales du Quotidien de la jeunesse de Chine, 64,4 % des personnes interrogées pensent que l’idée d’élever des enfants pour préparer ses vieux jours n’est plus d’actualité, et 44 % prévoient d’aller en maison de retraite.

Selon les données du Comité national d’action pour le troisième âge, la demande de consommation du marché des services destinés aux personnes âgées dépasse 3 000 milliards de yuans, et atteindra 5 000 milliards en 2050. Certains prévoient même que dans 13 à 15 ans, l’industrie du troisième âge remplacera l’immobilier pour devenir le premier secteur du pays.

Fin 2015, les maisons de retraite chinoises comptaient 6,73 millions de lits, soit 30,3 en moyenne pour mille personnes âgées. Malgré l’augmentation du nombre de lits par rapport à 2014, l’offre est encore très insuf fi sante par rapport à la demande réelle. En tant qu’ancien centre industriel du nord-est, la province du Heilongjiang a fait de l’industrie du troisième âge l’une des stratégies de sa revitalisation. Dans ses zones riches en ressources écologiques et touristiques, ont été plani fi és 100 projets baptisés « oiseaux migrateurs » sur les services destinés aux personnes âgées, dans lesquels des capitaux sociaux sont introduits.

Fortes perspectives pour les joint-ventures d’appartements destinés aux personnes âgées

Sun Chunfang, âgée de 85 ans cette année, a été la première personne à entrer dans la résidence-foyer Senior Living L’Amore du groupe Yuanyang, à Yizhuang de Beijing. Cette première entreprise de résidence-foyer à capitaux chinois et étrangers à Beijing a été construite par le groupe Yuanyang, géant chinois de l’immobilier, et par Columbia Paci fi c Management en 2013. Leurs parts dans le projet sont partagées. Ceci marque le premier succès d’investisseurs étrangers dans le marché chinois des seniors.

Une personne âgée fait l’expérience d’un scooter électrique de mobilité pour le troisième âge au Salon international de l’industrie du troisième âge 2017 à Beijing.

Après la mort de son mari, Mme Sun a vécu seule. Pour mettre fi n à sa solitude, elle a appelé la résidence-foyer le jour de son ouverture et a décidé de s’y installer immédiatement. Elle est satisfaite des services personnalisés et de haute qualité : elle peut lire et regarder la télévision avec les autres, prendre le thé dans l’aprèsmidi, faire des activités régulières comme la calligraphie, la danse, ou le cinéma le week-end. Préférant le gomoku, elle a joué toute une partie avec une autre résidente.

Installée dans la maison de retraite depuis trois ans, elle aime son quotidien. Des frais élevés (11 000 yuans en moyenne par personne, ou environ 1 584 dollars), elle dit : « Nous comprenons bien que la maison de retraite doit percevoir des frais de prestations pour gagner de l’argent. Mais les prix doivent correspondre aux services fournis. » Pour vivre ici, Mme Sun loue son logement, parce que sa pension de retraite ne suf fi t pas à régler les frais.

Elle a bien sûr envisagé les institutions de retraite publiques. Elle s’est inscrite en 2009 dans l’une d’elles, qui ne lui a pas encore donné de réponse : trop de gens attendent une place vacante. Conformément aux exigences minimales des institutions de retraite étrangères, un employé doit être présent pour trois personnes âgées, mais dans la plupart des institutions de retraite privées, la proportion est de cinq retraités pour chaque employé, et cela est encore plus dans les institutions publiques. Quant à Senior Living L’Amore, la proportion est d’un soignant pour quatre personnes âgées, et le ratio du personnel et des résidents est de 1 : 1,2.

« En moins de trois ans, la maison de retraite a réalisé un taux d’occupation de 100 %, alors qu’il faut trois ou quatre ans aux autres maisons pour y parvenir », déclare Wen Bo, directeur général de la résidence-foyer Senior Living L’Amore. Cent personnes âgées y vivent aujourd’hui. Selon Wen Bo, le succès de Senior Living L’Amore se rapporte bien au fait que l’investisseur étranger a choisi un partenaire local. « Une fois arrivée la période d’opération, la partie américaine alivré tous les droits de la gestion à la partie chinoise. C’est l’une des clés du succès de la coentreprise sino-américaine », explique M. Wen.

Devant ce marché prometteur, d’autres entreprises étrangères spécialisées dans les services consacrés aux seniors ont commencé à développer des projets ciblés ces dernières années. Entre autres, parmi les groupes français, on trouve Orpea, le plus grand groupe français de maisons de retraite, ainsi que le troisième DomusVi et le quatrième Colisée. DomusVi s’est lancé en coopération avec le groupe chinois Hanfor Holdings Co., Ltd pour créer une joint-venture de services destinés aux seniors.

« Les investisseurs étrangers doivent bien connaître les lois et règlements chinois, les domaines interdits et autorisés, avant d’entrer sur le marché », suggère Ren Yuan, professeur de l’Institut du développement social et des politiques publiques de l’université Fudan et directeur adjoint de l’Institut des études démographiques.

En outre, il indique que les investisseurs étrangers sur le marché chinois pourront rencontrer des problèmes en matière d’adaptation et d’obstacles institutionnels, mais aussi des con fl its avec la culture et les notions chinoises sur la vieillesse. « Ils doivent faire des études de marché, saisir les opportunités de marché, il n’est pas prudent de s’y lancer au hasard. »

L’attitude du gouvernement chinois concernant l’accès des investisseurs étrangers au marché de la retraite, autrefois limité, est aujourd’hui d’encourager et de guider, et le seuil d’accès est de plus en plus bas.

Les investisseurs étrangers capables de déployer leurs talents

À propos du manque d’installations et de personnel dans le secteur du troisième âge, le directeur du Centre des sciences et techniques du Comité national du troisième âge, Wu Yushao, estime que la réponse à ce problème est devenue une stratégie nationale et note que l’État encourage désormais six industries du troisième âge : les services de gestion de la santé, les soins de rétablissement, les services à domicile, l’éducation culturelle, les services pour un cadre de vie agréable et la gestion des biens des seniors.

Une maison de retraite de Longyan (Fujian)

Fin 2016, la Direction générale du Conseil des affaires d’État a publié l’Avis sur l’augmentation de la consommation dans les domaines du tourisme, de la culture, du sport, de la santé, de la retraite, de l’éducation et de la formation, prévoyant clairement une hausse globale de la consommation dans l’industrie du troisième âge.

L’attitude du gouvernement chinois concernant l’accès des investisseurs étrangers au marché de la retraite, autrefois limité, est aujourd’hui d’encourager et de guider, et le seuil d’accès est de plus en plus bas. Selon Hao Fuqing, directeur adjoint de la Division sociale de la Commission nationale du développement et de la réforme, la Chine éliminera les obstacles sur le marché et réduira le seuil d’accès pour faire jouer pleinement leur rôle aux différents acteurs du marché, qu’ils soient des entreprises, des individus, des institutions à but lucratif ou non lucratif, des investisseurs chinois ou étrangers. Les institutions de retraite étrangères béné fi cient également des conditions préférentielles en matière de politique agraire et de fi scalité que le gouvernement chinois donne aux institutions de retraite à but lucratif.

Il n’y a pas encore de leaders chinois dans le secteur des services axés sur le troisième âge. La plupart des entreprises en sont à leurs débuts. « J’estime que les capitaux étrangers arrivent au meilleur moment sur le marché de la retraite. Du point de vue de l’accès des capitaux industriels au secteur, la concurrence sera de plus en plus rude », prévoit Ren Yuan.

Selon lui, mieux vaut pour les grands groupes étrangers entrer le plus tôt possible et s’intégrer, avant que le marché chinois ne se développe pleinement, parce que la rentabilité sera plus importante dans le futur. Le problème est qu’il faut pouvoir investir lourdement les premières années. Les petites entreprises étrangères ont plus de chances de prospérer sur ce marché en y entrant plus tard.

Les services destinés aux personnes âgées portent sur un large éventail de domaines : les besoins élémentaires, les soins, la production d’articles spécialisés, la santé, les divertissements, la culture, etc. Un grand potentiel de développement s’offre aux investisseurs. « Dans le secteur des services au troisième âge, l’espace du marché est très grand pour les investisseurs étrangers, notamment en matière de formation du personnel », conclut Ren Yuan.