La voie de la légalité
Zhu Weidong
Le développement rapide des relations d’affaires entre la Chine et l’Afrique ces dernières années a contribué à de nombreuses transactions civiles et commerciales. En 2000, lors de l’établissement du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA), le volume des échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique avait atteint la barre des 10 milliards de dollars. Pour les 11 premiers mois de 2016, le chiffre atteignait 134,59 milliards.
Zhu Weidong, chercheur associé à l’Institut des études d’Asie de l’Ouest et d’Afrique, relevant de l’Académie des sciences sociales de Chine, s’est entretenu avec CHINAFRIQUE sur l’importance des questions juridiques transfrontalières dans les transactions civiles et commerciales entre les deux parties. Extraits:
LA Chine est le premier partenaire commercial de l’Afrique depuis 2009 et les investissements directs étrangers (lDE) de la Chine ont connu une croissance rapide en Afrique. Au cours des dix premiers mois de 2016, les lDE non fi nanciers de la Chine sur le continent ont dépassé 2,5 milliards de dollars, une croissance en glissement annuel de 31 %, d’après le ministère du Commerce de Chine.
Plus de 3 000 entreprises chinoises ont investi dans 52 pays et régions d’Afrique. Le continent est le second plus grand marché pour les projets contractuels de la Chine. D’après le Plan d’action de Johannesburg du FCSA (2016-2018), la Chine va accroître ses investissements en Afrique et prévoit d’augmenter le stock des investissements directs sur le continent pour le faire passer à 100 milliards de dollars en 2020, ce qui contribuera à davantage de transactions civiles et commerciales entre les deux parties.
Les fréquentes transactions civiles et commerciales entre les deux parties ont entraîné de problèmes juridiques transfrontaliers variés qui auront un impact négatif sur le développement durable des relations d’affaires s’ils ne sont pas traités de manière appropriée et eff i cace. Les problèmes juridiques transfrontaliers résultant des transactions d’affaires sino-africaines concernent des cas au civil, au commercial et au pénal. Le nombre de cas concernant des parties chinoises devant les tribunaux ou les institutions arbitrales africaines augmente rapidement.
Les différends civils et commerciaux entre les deux parties relèvent des contrats, des investissements, des délits et des affaires familiales. En ce qui concerne les cas au pénal, ce sont principalement des causes de traf i c de drogues illégales, les transactions sur la faune et la fl ore protégées et les fraudes dans le domaine des télécommunications. Le nombre accru de problèmes juridiques transfrontaliers a dans une certaine mesure porté atteinte au développement sain des relations d’affaires et attiré l’attention des gouvernements concernés. Dans certains des plans d’action adoptés par la Conférence ministérielle du FCSA, des propositions ont été faites pour répondre à ces problèmes juridiques transfrontaliers.
Le règlement approprié et eff i cace des problèmes juridiques transfrontaliers entre les parties concernées nécessite un cadre juridique bilatéral d’ensemble et sain qui couvre le civil, le commercial et le pénal, les investissements et la double imposition. Mais à présent, le cadre juridique bilatéral entre la Chine et les pays africains est loin d’être exhaustif et doit être amélioré.
Le Premier ministre Li Keqiang prononce un discours lors de la 54esession annuelle de Asian-African Legal Consultative Organization.
Actuellement, très peu de pays africains ont ratif i é les conventions multilatérales dans l’assistance juridique civile et commerciale. Seuls l’Égypte, le Maroc, le Botswana, le Malawi et les Seychelles ont accédé à la Convention de La Haye de 1965 relative à la signif i cation et la notif i cation à l’étranger des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile ou commerciale, et seuls le Maroc, l’Afrique du Sud et les Seychelles sont devenus parties à la Convention de La Haye de 1970 sur l’obtention des preuves à l’étranger en matière civile ou commerciale. ll est manifestement nécessaire pour les parties concernées de conclure davantage de traités bilatéraux d’assistance judiciaire pour les dossiers civils et commerciaux pour permettre un meilleur règlement des différends juridiques transfrontaliers. Cela entraînera dans le cas contraire de nombreux désagréments aux parties qui participent aux transactions d’affaires transfrontalières.
L’augmentation importante des crimes transfrontaliers entre la Chine et l’Afrique ces dernières années nécessite aussi la négociation et la conclusion de plus de traités bilatéraux d’assistance judiciaire dans les domaines de l’extradition et le transfert des personnes condamnées pour lutter contre de tels crimes de manière eff i cace. Cependant, à ce jour, seules la Namibie, l’Algérie, la Tunisie, l’Afrique du Sud et l’Égypte ont conclu des traités bilatéraux sur l’assistance judiciaire dans les dossiers criminels avec la Chine, et seuls la Namibie, l’Algérie, la Tunisie, l’Afrique du Sud et l’Angola ont conclu des traités bilatéraux d’extradition avec la Chine. D’après des informations du ministère des Affaires étrangères de Chine, le Kenya et la Chine veulent conclure un tel traité bilatéral. De plus, les négociations pour le traité d’assistance judicaire bilatérale et d’extradition entre la Chine et la République de Maurice sont en cours.
Finalement, et d’une grande importance, les traités sur la double imposition (TDl) entre la Chine et les pays africains. Le TDl sont un outil juridique important pour les parties concernées dans les transactions d’affaires transfrontalières. Cela permet d’éviter le prélèvement des taxes par deux ou plusieurs juridictions pour un même revenu déclaré et des transactions fi nancières, réduisant ainsi la charge fi scale des agents économiques des deux parties et stimulant leurs relations d’affaires. D’après des informations de l’Administration d’État des impôts de Chine, la Chine a conclu 14 TDl avec des pays africains, notamment la République de Maurice, le Soudan, l’Égypte, l’Afrique du Sud, le Nigéria, l’Ouganda, le Botswana et le Zimbabwe, mais ils ne sont pas encore entrés en vigueur pour ces trois derniers pays.
Personne ne doute du rôle que la loi joue dans le maintien des relations d’affaires et de l’ordre social, notamment pour les transactions transfrontalières civiles et commerciales. ll n’existe pas de système juridique uniforme qui régit les transactions civiles et commerciales dans le monde, pour des questions de souveraineté nationale et de traditions juridiques différentes. ll est donc important pour les pays concernés d’adopter des cadres juridiques bilatéraux pour régir de telles transactions, ce qui peut apporter à la fois une sécurité et une prédictibilité d’ordre juridique, ainsi qu’un environnement juridique sûr pour ceux qui effectuent ces transactions.
À l’heure actuelle, le cadre juridique bilatéral entre la Chine et les pays africains doit encore être amélioré pour fournir une garantie juridique saine pour le développement durable des relations d’affaires entre les deux parties. Les gouvernements de Chine et des pays africains peuvent travailler ensemble à l’avenir pour établir un cadre juridique global qui améliorera réellement la conf i ance de ceux qui participent aux transactions transfrontalières, af i n que les transactions d’affaires durables entre les deux parties perdurent. CA