L’essor du billet rouge en afrique
L’impact du yuan, monnaie de réserve, sur l’Afrique par jeremy Stevens
un changement est en cours dans le système monétaire international. Il y a quelques années, le yuan s’est mis sur la voie de l’internationalisation. À la Standard Bank, nous avons très tôt été aux premières loges : en 2012, la Banque centrale du Nigeria avait annoncé, de nos bureaux à Beijing, qu’elle convertirait 5 % de ses réserves en yuans. Cette tendance a certainement stimulé l’imagination.
De manière judicieuse, Beijing s’est concentré sur l’élargissement du champ d’utilisation du yuan, pour aller chercher au-delà des limites géographiques de la Chine. Elle a multiplié le nombre de valeurs contre lesquelles il est échangé et a renforcé son utilisation dans la dénomination et le règlement du commerce transfrontalier et des transactions financières.
L’internationalisation n’est pas la même chose que le fait d’être une devise de réserve. En effet, l’usage est une condition nécessaire pour obtenir le statut de devise de réserve, mais cela n’est certainement pas suffisant. Une devise de réserve est une devise considérée comme une réserve de valeur, ce qui est une perspective entièrement différente. Pour y arriver, la Chine devait remplir deux conditions préalables : des comptes de capitaux ouverts et des marchés financiers développés.
Nous avons vu des réformes significatives dans le modèle économique de la Chine, avec notamment l’adoption d’un régime de change flottant, la libéralisation des taux d’intérêt ou encore l’ouverture des comptes de capitaux. Pour chacune de ces mesures, la Chine a encore du chemin à parcourir, mais elle doit avancer lentement. La précipitation exposerait sa monnaie, alors que les fragilités structurelles sont encore manifestes.
Ce chemin s’étendra vraisemblablement sur une vingtaine d’années avec trois grandes étapes : tout d’abord, le yuan est passé depuis 2009 d’un moyen de paiement et de transaction domestiques à un moyen de règlement régional dans le commerce international. Ensuite, cette monnaie devrait passer d’une utilisation principalement de règlement commercial à une utilisation servant à la transaction financière et la tarification de produits. Enfin, les banques centrales pourront et seront enclines à acheter des yuans pour leurs réserves.
Tout s’est accéléré en novembre 2015, lorsque le Fonds monétaire international (FMI) a complété sa révision quinquennale de son panier de devises constituant les droits de tirage spéciaux (DTS). Conformément aux attentes, le yuan fut inclus et cet élargissement prendra effet à partir d’octobre 2016. Cependant, cette évolution ne signifie pas que le yuan va s’apprécier, surtout si la Banque populaire de Chine (BPC) décide de laisser les forces du marché jouer un plus grand rôle dans l’évaluation de cette devise.
Nous estimons que toute réaction positive s’avérera temporaire, du fait, en grande partie, de notre vision du dollar US et de la divergence politique continue entre la Chine et les États-Unis. Les États-Unis se préparent à augmenter les taux d’intérêts, tandis que la Banque centrale européenne (BCE) campera vraisemblablement sur ses positions. Ces tendances placent la Chine dans une position problématique : d’un côté, ses propres fondamentaux économiques exigent des taux plus bas ; de l’autre, le yuan continue à être géré en référence au dollar.
Cette asymétrie économique suggère que Beijing ne peut pas simultanément éviter les défauts de paiementet les faillites et maintenir son taux de change face au cycle de resserrement des États-Unis. Sans dépréciation additionnelle, la balance des paiements n’effectuera pas les ajustements, qui sont pourtant nécessaires, et les autorités ne pourront pas s’affirmer sur les conditions monétaires nationales ni terminer le cycle de déflation.
Il faut dire que l’indice chinois des prix à la consommation en octobre 2015 a augmenté de 1,3 % en glissement annuel, contre 1,5 % en novembre de la même année. L’indice des prix à la production s’est également contracté de 5,9 % pour le deuxième mois consécutif, amenant ce déclin vertigineux à son 45emois. Après près de quatre ans de chute des prix en sortie d’usine, la Chine doit trouver un moyen pour mettre un terme aux ajustements déflationnistes, afin de générer une certaine dynamique économique.
Le soutien monétaire actuel devrait contribuer à intensifier la faiblesse de sa devise. Après six coupes dans les taux d’intérêts au cours des douze derniers mois, nous attendons une baisse au premier trimestre de 2016, faisant de la Chine l’un des rares pays, dont la banque centrale abaisse ses taux.
Malheureusement, les bilans comptables en berne des entreprises limitent l’efficacité des baisses des taux d’intérêt. Les entreprises publiques et les gouvernements locaux ont accumulé trop de dettes sur les six dernières années et les actifs des banques chinoises ont connu une croissance quatre fois plus rapide que le PIB nominal depuis 2009. Ces baisses des taux d’intérêt ont peu de chances de stopper le ralentissement économique, mais ils visent plutôt à endiguer son rythme. L’économie chinoise pourrait terminer 2015 avec une activité économique se stabilisant plus ou moins aux niveaux actuels. Cependant, la croissance du PIB a de fortes chances de passer de 6,9 % en 2015 à 6,5 % en 2016. Comme en 2014, les incertitudes liées à ces prévisions penchent à la baisse.
Le développement du marché des changes de la Chine est encore à un stade primaire et la route est longue avant que le yuan ne devienne une véritable
devise internationale. Pourtant, malgré des progrès peu rapides, de plus en plus de commerces et d’investissements devraient être réalisés chaque année directement entre le yuan et d’autres devises. Pour la Standard Bank, le succès de la mondialisation du yuan et de la multiplication des transactions en yuans en Afrique et ailleurs semble évident, du fait de la convergence des liens diplomatiques et commerciaux entre la Chine et l’Afrique.
Premièrement : l’influence de la Chine sur le continent a connu une forte croissance, car les succès - petits et grands - ont été nombreux.
Deuxièmement : la Chine et l’Afrique ont l’avantage d’avoir des relations politiques de haut niveau et des institutions bilatérales et multilatérales pour le développement robustes, qui soutiendront ce processus, notamment la Banque de développement de Chine (BDC), la Banque d’Exportation et d’Importation de Chine et, plus récemment, la Nouvelle banque de développement des BRICS.
Troisièmement : les liens commerciaux commencent tout juste à se tisser. Les entreprises chinoises et les Chinois sont arrivés en Afrique pour investir sur le long terme. Ils vont avoir besoin d’ouvrir des comptes et d’utiliser des produits en yuans. Les travailleurs vont également vouloir renvoyer de l’argent dans leurs familles.
Quatrièmement : le commerce entre la Chine et l’Afrique est important, ce qui entraîne une croissance rapide de l’offre et de la demande en yuans.
Cinquièmement : l’internationalisation permettra de faire diminuer plus directement les coûts, de permettre une meilleure utilisation des fonds de roulement et d’améliorer les pratiques de gestion des risques, soutenant ainsi avec d’autres mesures incitatives le flux commercial. De façon similaire, les investissements trouveront un soutien dans des sources de financements moins onéreuses (levés à Hong Kong ou au moyen d’emprunts) et de meilleures protections de capitaux (instruments de couverture), ce qui entraînera des conditions plus favorables pour les projets africains.
En mai 2014, dans son discours au Centre de conférences de l’Union africaine, le Premier ministre chinois, Li Keqiang, a annoncé que la Chine visait une augmentation du commerce sino-africain de 220 à 400 milliards de dollars et des investissements directs de la Chine en Afrique à 100 milliards de dollars. Il a appelé la Chine et l’Afrique à travailler ensemble sur des projets de coopération financière et la Chine s’est engagée à soutenir la coopération bilatérale dans les règlements transfrontaliers en devises locales, les swaps de devises et l’établissement mutuel de branches financières.
En décembre 2015, le Président Xi Jinping a également annoncé lors du Forum sur la Coopération sino-africaine à Johannesburg, que la Chine offrirait un appui financier de 60 milliards de dollars. Cette enveloppe couvrirait l’industrialisation, la modernisation agricole, les infrastructures, les services financiers, le développement écologique, l’aide au commerce et aux investissements, la réduction de la pauvreté, ainsi que le bien-être des citoyens, la santé publique, les échanges interpersonnels, la paix et la sécurité. Ca
(L’auteur est un économiste du groupe Standard Bank basé à Beijing.)
Les foules étaient transportées par les larmes et les rires le 12 décembre 2015 lorsque le ministre des Affaires étrangères de France, Laurent Fabius, président de la Conférence de Paris sur les changements climatiques, donna un coup de marteau vert signalant la fin d’un marathon de treize jours de négociations entre les délégués de près de 200 pays et régions réunis à Paris. Les représentants à la Conférence des Nations Unies de 2015 ont conclu un accord qui restera un des rares moments de l’histoire de la coopération mondiale face à un défi monumental. Tandis que les négociateurs s’embrassaient dans la joie du succès, de graves inquiétudes gisaient dans les coins noirs de leur esprit : tout cela n’était que le commencement d’une guerre contre les changements climatiques qui s’étirerait sur plusieurs générations.
La victoire sans précédent était le résultat de 195 pays qui, à l’unisson, s’étaient engagés en un pacte « climatique » ayant force de loi. Ces pays portaient l’espoir du monde de diminuer les émissions de gaz à effet de serre pour protéger l’avenir contre les conséquences catastrophiques du réchauffement de l’atmosphère. Au cours des 23 dernières années depuis la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), peu de progrès ont été accomplis, même si l’on compte comme des réussites le Protocole de Kyoto et l’Échéancier de Bali. Pensons à l’échec de la Conférence de Copenhague, où les pays se contredisaient l’un l’autre dans l’animosité, et les pays développés refusaient de prendre leurs responsabilités historiques.
Le monde a parcouru un long chemin depuis le temps où il semblait que les pays ne pourraient régler leurs disputes de myopes, échec reflété par le ton et le langage des leadeurs impliqués dans l’accord. « Nous sommes entrés dans une nouvelle ère de coopération sur les problèmes les plus complexes que l’humanité n’ait jamais connus. Pour la première fois, le monde s’est juré de diminuer les émissions, de renforcer la ténacité et de prendre des mesures communes concernant le climat », a dit le secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, qui a vu dans l’Accord un franc succès du multilatéralisme.
« À la Conférence de Paris sur les changements climatiques, nous avons conclu un accord équitable et rationnel, global et équilibré, ambitieux, durable et efficace, et légalement contraignant », s’est exclamé fièrement Xie Zhenhua, représentant spécial de la Chine sur les questions de changement climatique. Il a ajouté que l’accord donnera au monde un signal « clair, robuste et positif pour réaliser un développement durable à basses émissions et sans dommages pour le climat. »
Nicolas Stern, président de l’Institut de recherche Grantham sur les changements climatiques et l’environnement, de Londres, considère la conclusion de la Conférence de Paris comme un moment historique et croit que l’Accord de Paris créera de très vastes occasions pour les pays qui commencent à accélérer vers la croissance économique sans carbone.
Lo Sze Ping, PDG de la Fondation World Wildlife de Chine, a fait remarquer que la Chine joue un rôle très constructif et essentiel en poussant de l’avant la conclusion de l’Accord de Paris. « Plusieurs solutions essentielles comme des propositions acceptées dans le texte final sont vraiment le résultat de la coopération de la Chine avec plusieurs autres participants importants de la négociation », a dit M. Lo.
La Chine prend l’initiative sur des questions importantes en tendant la main à divers pays. « Cette fois, la Chine a semblé plus confiante et ouverte dans la négociation, et a joué un rôle plus important dans la coordination des pays développés ou en développement, et dans la promotion de la confiance mutuelle et du consensus entre les divers groupes », a dit Yang Fuqiang, conseiller supérieur sur le climat, l’énergie et l’environnement du Programme du Conseil de défense des ressources naturelles de Chine.
Bien que « la roue de l’action pour le climat tourne lentement, a dit Kumi Naidoo, cadre dirigeant de Greenpeace International, elle a tourné à Paris ». Cette métaphore montre qu’il espère que la roue continue de tourner vers l’avant, non l’arrière.
Les leadeurs du monde cherchent des réponses à la crainte qu’inspire le réchauffement de la Terre par Deng Yaqing