par Francisco Little
Le père Noël est bien arrivé en Chine et visiblement il ne partira pas de sitôt
Ce ne sont pas les pères Noël qui manquent en Chine.
Peut-être l’ignorez-vous encore, mais tenez-vous-le pour dit : le père Noël a un faible pour la Chine. Dès début novembre, ses joues roses, ses yeux bleus et sa barbe grossièrement faite en mousse de plastique vous guettent dans les devantures des magasins. Les décorations de Noël deviennent un enjeu de compétition en ville, et aucune entreprise digne de ce nom ne souhaite être laissée pour compte.
Des boules d’or, des lumières clignotantes et des arbres de Noël en plastique blanc surgissent en nombre in fini. À l’approche des fêtes, les halls d’hôtel et les centres commerciaux deviennent de véritables mines de stimulation sensorielle – les paillettes et les chants choraux sont particulièrement excessifs près des établissements cinq étoiles. Et faites gaffe aux fausses statues grandeur nature du père Noël qui agitent leurs mains en poussant des « ho-ho-ho »gutturaux pour attirer les consommateurs.
Il y a à peine deux décennies de cela,la plupart des Chinois n’avaient aucune idée de ce qu’était Noël ou de ce que cette fête représentait. Dans l’esprit de certains,c’était une fête simplement associée au capitaliste. Le fait que Noël était une fête religieuse commémorant la naissance du Christ est d’ailleurs encore largement inconnu parmi la population. Au lieu de cela, la fête est célébrée comme une énième tradition occidentale visant à « faire la fête », rencontrer des amis et échanger des cadeaux.
Shengdan laoren(littéralement, le vieil homme de Noël) a même fait son apparition dans certaines familles, qui déposent des cadeaux dans des bas en mousseline, ou pour divertir les employés de bureau qui se réjouissent d’une petite pause. Somme toute, c’est un Noël « à la chinoise ».
Bien qu’il soit difficile de trouver des chiffres précis sur le nombre de chrétiens en Chine, certains célèbrent en illuminant leurs maisons avec des lanternes en papier et en décorant leurs sapins de Noël– connus ici sous le nom « d’arbres de lumière » – avec des lanternes, des fleurs et des chaînes en papier. Mais comme pour toutes les célébrations traditionnelles, une fois le masque religieux ou culturel tombé,le but ultime des magnats du commerce est d’encourager la consommation.
À la fin du mois de novembre, les hôtels de tout genre à Beijing se mettent à vendre leurs dîners de Noël. La compétition pour attirer les fins gourmets fait rage. Mais gare à votre porte-monnaie, car dans la plupart des hôtels haut de gamme, il vous en coûtera entre 150 et 250 dollars pour vous remplir la panse le soir du réveillon. La période de Noël en Chine semble être le coup d’envoi à toute une série d’activités de marketing qui s’étend de la fin novembre jusqu’au Nouvel An chinois et à la Saint-Valentin,soit jusqu’à la mi-février.
Même les employés d’un supermarché populaire auprès des étrangers à Beijing revêtent, bien que maladroitement, un chapeau de Noël en cette période des fêtes.Avec un petit sourire en coin, elles vous saluent d’un « joyeux Noël » enthousiaste –visiblement, elles ont reçu des instructions leur demandant de saluer ainsi tous les clients étrangers. J’ai trouvé leur attention très chaleureuse, malgré la commercialisation à outrance de cette fête. Cela m’a fait penser à la façon dont toutes les célébrations culturelles visent en fin de compte la même chose :nous apporter un peu de bonheur en nous réunissant avec des personnes qui nous sont importantes. Ironiquement, plus nous nous éloignons de cette intention première, plus nous semblons vouloir y retourner.
Cette commercialisation de la fête de Noël, qui a fait son apparition au cœur de Beijing et qui s’étend désormais à travers le pays, est considérée par certains comme un phénomène typiquement chinois. Ce qui avait probablement commencé à l’origine comme un moyen de faire des affaires auprès des visiteurs étrangers a été assimilé et est devenu une version chinoise d’une naissance célébrée à Bethléem il y a 2018 ans.
Pour clore sur une note positive, au moins la plupart des Chinois connaissent maintenant la mélodie deVive le vent... CA