Une coopération prometteuse
La visite d’État du Président chinois Xi Jinping en Égypte permet de rapprocher les deux grandes civilisations par He Wenping
Au début de l’année, le Président chinois
Xi Jinping a effectué sa première visite d’État en Égypte. Au cours des années écoulées, les pyramides et la Grande Muraille, symboles de ces deux grandes civilisations mondiales, se sont éloignées l’une de l’autre. Grâce à la coopération sino-égyptienne, il est certain qu’elles s’associeront plus étroitement dans l’avenir.
L’amitié et la coopération entre la Chine et l’Égypte remontent loin dans l’histoire. Le 30 mai 1956, l’Égypte a été la première nation arabe et africaine à établir des relations diplomatiques avec la Chine. En 1999, l’Égypte a été le premier pays en voie de développement à établir des relations de coopération stratégique avec la Chine. En 2006, les deux pays ont signé des plans de mise en œuvre pour approfondir leurs relations de coopération stratégique. Ces dernières années, dans le cadre du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA) et du Forum sur la Coopération sino-arabe, la Chine et l’Égypte ont conduit une coopération amicale dans divers domaines. Fin 2014, les deux pays ont décidé d’élever leurs relations au niveau d’un partenariat stratégique global.
La Chine considère depuis toujours les relations sino-égyptiennes d’un point de vue stratégique et dans une perspective à long terme, et soutient l’Égypte par le biais d’actions concrètes pour soutenir sa stabilité et son développement. Début 2011, sous l’impact du Printemps arabe, la situation politique égyptienne a été déstabilisée, ce qui a profondément affecté son économie et surtout son industrie touristique. Mais la Chine n’a pas cessé sa coopération économique avec l’Égypte pour autant. En 2011, le commerce bilatéral entre les deux nations a atteint 8,8 milliards de dollars, soit une augmentation de 26,5 % par rapport à l’année précédente. Par ailleurs, la valeur des investissements directs chinois en Égypte s’est élevée à 82,8 millions de dollars, soit une hausse de 60,4 % en glissement annuel. Ces chiffres démontrent l’amitié réelle qui existe entre les deux pays.
Lors du défilé militaire chinois du 3 septembre 2015, commémorant le 70eanniversaire de la victoire de la Guerre de résistance du peuple chinois contre l’agression japonaise et de la Guerre mondiale antifasciste, 81 soldats égyptiens ont marché sur la place Tian’anmen, devenant ainsi la seule formation de la Garde d’honneur africaine et arabe à participer à cet événement. Cet honneur confirme une amitié profonde, à l’épreuve du temps.
La visite d’État de M. Xi permet non seulement de tourner une nouvelle page dans l’histoire des relations sinoégyptiennes, mais aussi de mettre en œuvre les plans d’action adoptés en décembre 2015 lors du Sommet de Johannesburg du FCSA, qui prévoient un développement rapide des relations sino-africaines.
Les dix plans de coopération, d’une valeur totale de 60 milliards de dollars, proposés par M. Xi lors du Sommet de Johannesburg ont retenu l’attention des participants. Les nouvelles mesures mises en avant dans les domaines tels que l’industrialisation, la modernisation agricole et les infrastructures ont été élaborées en fonction de l’Agenda 2063 de l’UA, pour répondre aux besoins réels de développement en Afrique.
Compte tenu de la complémentarité de la coopération sino-égyptienne, il est envisageable de faire de l’Égypte un pilote d’essai dans la mise en œuvre des dix plans de coopération. D’une part, forte d’une civilisation splendide et d’une large population, l’Égypte abondeen ressources humaines, touristiques et minérales. Par ailleurs, sa situation géopolitique avantageuse facilitera la pénétration des entreprises et produits chinois dans les marchés européen, moyen-oriental et africain. D’autre part, étant la deuxième plus grande économie du monde, la Chine dispose d’une importante réserve de devises, d’une forte capacité d’investissement et d’une riche expérience en matière de réduction de la pauvreté et de développement économique adaptée aux pays en développement. Par conséquent, le renforcement et le développement des relations de coopération stratégique avec l’Égypte permettent non seulement de promouvoir le développement durable de la coopération économique et commerciale bilatérale, mais aussi de servir de point d’appui stratégique à la politique chinoise dans la région méditerranéenne et au Moyen-Orient, facilitant l’approfondissement de ses relations de coopération amicale avec les pays arabes et l’Afrique du Nord. L’Égypte a besoin de la Chine, et vice-versa.
En matière d’échanges commerciaux, le volume du commerce bilatéral sino-égyptien s’est élevé à 11,6 milliards de dollars en 2014 et à 9,67 milliards de dollars de janvier à septembre 2015, soit une hausse de 13 % par rapport à la même période de l’année précédente. S’agissant de la coopération en matière de capacité de production, la Chine et l’Égypte s’avèrent aussi fortement complémentaires. S’il existe une large capacité de production excédentaire en Chine, le niveau de l’industrialisation égyptienne est relativement bas. Un besoin urgent se fait donc sentir d’introduire les investissements chinois en Égypte. C’est dans ce contexte que lors de la visite d’État du Président égyptien Abdel Fattah al-Sissi en Chine en septembre 2015, les deux pays ont signé un accord pour renforcer leur coopération en matière de capacité de production, en établissant notamment une première liste de projets phares de coopération.
He Wenping
Un employé d’une entreprise chinoise dans la «Zone économique et commerciale de coopération sinoégyptienne de Suez»
Après les périodes chaotiques au cours desquelles l’Égypte a souffert de bouleversements politiques et sociaux, la relance économique constitue l’un des enjeux majeurs pour l’actuel gouvernement égyptien. C’est ainsi qu’au cours de sa visite d’État en Chine en décembre 2014, M. Sissi a indiqué que la construction d’infrastructures jouerait un rôle clé dans la promotion économique de son pays, tout en affirmant que l’Égypte serait partie prenante dans l’initiative chinoise « une Ceinture et une Route ». En plus, il a profité de sa visite pour s’entretenir face-à-face avec des entrepreneurs chinois dans l’objectif de les inviter à investir davantage en Égypte dans des domaines aussi variés que les énergies, l’agriculture, les infrastructures, les télécommunications, etc.
En fait, parmi les 65 pays situés le long de la Ceinture économique de la Route de la soie et la Route maritime de la soie du XXlesiècle, l’Égypte est le seul pays africain. En parallèle, le gouvernement égyptien a récemment lancé son plan de développement du «Corridor économique du canal de Suez», visant à transformer sa rive d’une longueur de 190 km en une zone économique mondiale. Dans cette perspective, avec la promotion de ces deux initiatives, la Chine et l’Égypte auront davantage de points communs dans leurs objectifs stratégiques et leurs conceptions de développement, et cela permettra aussi de cultiver de nouveaux points de croissance pour les relations bilatérales sino-égyptiennes.
La «Zone de coopération économique et commerciale sino-égyptienne» dans la région au nord-ouest de Suez en est un exemple patent. Cette zone est située à l’une des extrémités du corridor économique du canal de Suez, jouissant d’une situation géographique avantageuse et des ressources de qualité égyptiennes. Fin 2013, la valeur des investissements dans cette zone s’élevait déjà à environ 90 millions de dollars, et 58 entreprises s’y sont installées, permettant la création de plus de 2 000 emplois. Parmi ces entreprises, on cite notamment Jushi Chine, l’un des plus grands producteurs de fibre de verre du monde, qui a investi, dans un premier temps, 223 millions de dollars, avec une capacité de production annuelle estimée à environ 80 000 tonnes. Le lancement de ce projet contribue non seulement au développement de l’industrie égyptienne des matériaux composites, mais aussi à la création d’emplois, à l’amélioration de la gestion d’entreprises, à l’augmentation des recettes en devises et à la croissance économique locale.
La concordance entre l’initiative chinoise « une Ceinture et une Route » et la stratégie égyptienne du «Corridor économique du canal de Suez» s’explique notamment par le statut stratégique du canal de Suez et la situation géopolitique de l’Égypte. La visite d’État de M. Xi en Égypte permet de lier plus étroitement ces deux grandes civilisations. CA
(L’auteure de cet article est chercheuse à l’Institut Charhar et à l’Institut de recherche des études d’Asie de l’Ouest et d’Afrique relevant de l’Académie chinoise des sciences sociales.)